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10 septembre 2015 4 10 /09 /septembre /2015 06:00

Ces 12 papes qui ont bouleversé le monde

Christophe Dickès

Le livre est un peu un pari, puisqu'il s'agit pratiquement pour l'auteur de retracer, à travers la vie de douze papes qui en leur temps jouèrent un rôle exceptionnel, quelques grandes phases de l'histoire de l'Eglise.

Christophe Dickès, qui a dirigé en 2013 un très complet Dictionnaire du Vatican et du Saint-Siège (ici), commence par expliquer dans son introduction le caractère particulier, douloureux presque, de cette fonction de Souverain Pontife, puis comment il a "sélectionné" les douze papes choisis parmi plus de deux cent soixante. Il s'intéresse finalement, après Saint Pierre bien sûr, premier de tous, à deux papes du Ve et VIe siècles (Léon le Grand et Grégoire le Grand), à quatre souverains temporels du Moyen-âge lorsque les successeurs de Pierre prétendent régenter le monde occidental et se heurtent à quelques uns des plus grands monarques (Grégoire VII, Innocent III, Boniface VIII et Jules II), à deux papes grands rénovateurs du rite et de la doctrine (Pie V et Pie X), et enfin à trois "modernes" (Pie XI, Jean XXIII et Jean-Paul II). Chaque chapitre biographique remet dans son contexte du moment l'action des papes choisis et met en relief à la fois leurs personnalités et leurs qualités propres ainsi que leur rôle particulier durant leur "règne". Bien écrites, agréables à lire, ces biographies nous en apprennent ainsi beaucoup non seulement sur le pape concerné mais aussi sur son époque. Personnellement, j'ai tendance à préférer les papes du Moyen-âge, vieux souvenirs de la lutte des Guelfes et des Gibelins, lorsque les papes n'hésitaient pas à partir en campagne et faisaient trembler rois et empereur ("Aller à Canossa"). Et puisque nous en sommes à cette période, j'ai regretté qu'aucun des neuf papes d'Avignon et du grand schisme d'Occident ne figure dans la liste. Sans doute est-ce le Méridional en moi qui parle... 

Un regard pointilliste sur l'histoire du Saint-Siège, qui met en valeur certaines personnalités et certaines évolutions. Une lecture complémentaire à de récents ouvrages plus complets.

Tallandier, Paris, 2015, 380 pages. 21,90 euros.

ISBN : 979-10-210-0328-6.

Quelques papes exceptionnels
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22 juillet 2015 3 22 /07 /juillet /2015 06:00

Singulière noblesse

L'héritage nobiliaire dans la France contemporaine

Eric Mension-Rigau

L'un de mes camarades exprime souvent, au deuxième degré, l'idée que la page la plus pertinente du Figaro est celle qui présente les annonces de mariages, naissances et décès dans la "bonne société". Plus trivialement, la présence dans les magazines "people", voire dans des périodiques spécialisés qui leur sont exclusivement consacrés, des monarques, héritiers, prétendants et nobles d'hier et d'aujourd'hui reste une perpétuelle source d'étonnement. Mais si j'ai tendance à considérer qu'un maréchal d'empire mérite davantage ses titres qu'un "héritier" qui n'a connu que l'effort de naître, je préfère néanmoins un authentique aristocrate qui considère toujours que "noblesse oblige" à un bourgeois parvenu qui étale ses Rolex (avant 50 ans ?). Le sujet, en tout cas fait toujours parler...

En trois grandes parties ("Un monde de mémoire", "L'attraction du pouvoir" et "Les arbitres des élégances"), Eric Mension-Rigau nous fait donc pénétrer dans l'histoire récente de ces familles, leurs évolutions, leurs difficultés parfois, leurs exigences personnelles souvent. Il s'intéresse essentiellement au XXe siècle, mais remonte parfois jusqu'au XIXe. Dans la première partie, le récit des efforts entrepris pour conserver tel ou tel château est d'autant plus intéressant que des situations très différentes sont évoquées, différences également entre les propriétaires eux-mêmes, plus ou moins aisés, plus ou moins titrés, ... ou pas du tout, mais se prenant parfois au jeu dès lors qu'ils sont propriétaires d'un château. De même, les évolutions sociétales touchent la noblesse traditionnelle tout autant que les autres catégories de la population et le rapport des plus jeunes à leur histoire familiale à tendance à s'affaiblir, quand ils n'en conservent pas que les aspects snobinards ou caricaturaux. Dans la seconde partie, le paradoxe du service des armes et de l'Etat est résumé par une citation de Jean d'Ormesson : "Nous disions tout le mal de la France que nous pouvions, mais il était de bon ton d'aller se faire tuer à son service", et l'auteur donne un peu plus loin l'exemple de "la famille Le Pelletier qui, avec ses deux branches de Glatigny et de Woillemont, rassemble onze générations d'officiers de Louis XIV à nos jours", sans distinction de la forme de gouvernement. Servir devient plus important que l'adhésion à un pouvoir particulier. Chiffres à l'appui, il témoigne également que les représentants des familles titrées sont en pourcentage encore plus nombreux au Quai d'Orsay, et de façon générale encore très présents dans la haute administration. L'auteur s'intéresse également à la question du mariage et au concept de "dérogeance" : "La noblesse a toujours fait des mariages avec la bourgeoisie riche pour redorer son blason. La haute noblesse est la plus mâtinée : plus vous allez vers la hauteur, plus vous avez de sang bourgeois, plus vous descendez, plus vous avez de sang bleu". Viennent alors dans la troisième partie les sujets liés à l'éducation, à la culture, au savoir-vivre : "Le bal des Débutantes, réapparu en 1992 à l'hôtel Crillon, place de la Concorde, et organisé pour la vingt-deuxième année en 2014, est à cet égard exemplaire. S'il prétend s'inscrire dans la tradition d'un art de vivre à la française, il flirte en réalité avec Hollywood et tourne le dos à la noblesse". L'évolution des jeunes générations n'est pas fondamentalement différente de celle de leurs camarades des mêmes universités ou grandes écoles, surtout si la famille conserve de solides moyens financiers... Finalement, on parle autant d'argent que de comportement et de savoir-être dans ce livre, qui se termine presque sur une longue liste de nobles occupant des postes de direction dans la banque, le monde industriel, le MEDEF, mais aussi parfois dans le sport ou le monde des arts.

Un livre dense, solidement référencé et qui donne beaucoup d'informations. Au bilan, un "déclassement" relatif, culturel plus que social, de plus en plus rapide semble-t-il, en dépit de certaines "poches de résistance", pour lesquelles la notion de devoir(s) reste une réalité Et je préfère toujours mon maréchal d'empire.

Fayard Histoire, Paris, 2015, 377 pages, 20,- euros.
ISBN : 978-2-213-67086-7.

Que reste-t-il de la noblesse ?
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29 mai 2015 5 29 /05 /mai /2015 06:00

Les écoles dans la guerre

Acteurs et institutions éducatives dans les tourmentes guerrières

XVIIe siècle - XXe siècle

Jean-François Condette (Dir.)

Les enfants, les adolescent(e)s, les jeunes hommes et jeunes femmes, comme leurs maîtres et professeurs, occupent une position particulière dans les sociétés en guerre. Tout le mérite de ce livre est de tenter de dresser un tableau aussi complet que possible de cette problématique aussi souvent ambigüe que paradoxale.

Après une première partie qui aborde quelques situations antérieures (en particulier deux textes sur la période de la guerre de 1870), l'ouvrage se concentre sur les périodes de la Grande Guerre (11 contributions) et de la Deuxième guerre mondiale (9 contributions). Les intervenants s'intéressent autant aux enseignants eux-mêmes ("La valorisation du rôle des professeurs de l'enseignement secondaire dans la Grande Guerre", par Yves Verneuil, par exemple) qu'aux scolarités et à la vie dans les établissements ("L'enseignement ménager dans Lille occupée, 1915-1918", par Stéphane Lembré). On relève aussi l'étonnante histoire de "L'école commerciale de jeunes filles de Lille, 14 décembre 1915 - 6 juillet 1926", par Philippe Marchand, "une école née de la guerre" ; tandis que Ludovic Laloux revient sur "La croisade des enfants : un mouvement spirituel et patriotique fondé en 1915 au cours Saint-Seurin à Bordeaux". Pour la période 1940-1945, les mêmes thématiques se retrouvent, mais le champ d'observation est pour une part élargi à d'autres belligérants. On remarque le texte de Nathalie Duval sur "Les 'écoles nouvelles' à l'épreuve de la Révolution nationale", celui de Jean-François Condette sur "Les recteurs du Maréchal, administrer l'Education nationale dans les années noires de la Seconde guerre mondiale, 1940-1944", et celui de Monika Salmon-Slama sur "Le lycée polonais Kamil Cyprian Norwid de Villard de Lans, un lycée pour les Polonais dans le Vercors".

Les textes sobres sont variés, équilibrés et parfaitement référencés. Une vraie plus-value pour quiconque s'intéresse à ces thématiques.

Presses universitaires du Septentrion, Villeneuve d'Ascq, 2014, 548 pages, 32,- euros.

ISBN : 978-2-7574-0765-3.

Education et éducateurs en temps de guerre
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5 avril 2015 7 05 /04 /avril /2015 06:00

La papauté foudroyée

La face cachée d'une renonciation

Philippe Levillain

Un peu d'histoire religieuse, puisque nous sommes en un dimanche particulier. Acteur incontournable de la vie internationale aussi bien qu'agent influent dans la vie intérieure de nombreux Etats, le Vatican a été récemment soumis à des secousses internes importantes et à la révélation du scandale Vatileaks, et donc fragilisé, alors qu'un nouveau Souverain pontife tente d'inspirer de profondes évolutions. Le livre de Philippe Levillain arrive donc au bon moment pour nous aider à comprendre les changements en cours.

L'auteur date le début de sa chronique du pontificat de Jean-Paul II, avec les nombreuses questions non traitées ou non résolues par le pape polonais. Et, pour mieux comprendre la "renonciation" de Benoît XVI à la charge catholique suprême, pape autour duquel est construit l'essentiel du livre, il fait appel à l'exemple de Célestin V en 1294. Toute, absolument toute la politique intérieure vaticane et l'évolution de l'Eglise depuis une quarantaine d'années sont remises à plat et contextualisées, en queue de trajectoire du concile Vatican II. Après être longuement revenu sur les modalités de l'élection de Benoît XVI et les relations du nouveau pape avec son prédécesseur, dont le nouvel élu accepte d'endosser les erreurs ou les indécisions : "Il en résulte que le pontificat de Benoît XVI semble pris entre une élection favorisée par le sentiment du 'moins pire' et une Renonciation décidée à cause de l'impossibilité d'instaurer des réformes qu'il entendait mettre en oeuvre depuis 2010". Se pose ensuite la question de la canonisation de Jean-Paul II, selon une "initiative organisée" qui se heurte à de nombreuses réticences au Vatican même et dont il sera finalement très peu parlé. Dans un long développement qui témoigne de sa connaissance du sujet, Philippe Levillain détaille le processus de béatification puis de sanctification, en faisant référence tout à la fois à la doctrine, aux usages et aux influences au sein de l'Eglise. Il s'intéresse ensuite aux difficultés auxquelles se trouve confronté Benoît XVI, de la question des évêques traditionnalistes et de monseigneur Lefebvre, au fameux discours de Ratisbonne sur l'Islam et le djihad, à la Légion du Christ et ses scandales, et aux débats réccurrents sur la sexualité et la morale chrétienne, sans compter les scandales de pédophilie qui se multiplient à l'époque. Il aborde ensuite le dossier Vatileaks et les publications parallèles sur les finances et le fonctionnement du Saint-Siège, dont l'auteur minimise l'importance ou la nouveauté (ce qui nous donne d'ailleurs une vingtaines de pages très intéressantes d'explications sur le pourquoi et le comment de l'évolution des finances du Vatican). La deuxième moitié du livre est consacrée aux dix-huit derniers jours du pontificat de Benoît XVI, son retrait volontaire dont il trouve l'origine plusieurs années auparavant, l'organisation du conclave et l'élection de son successeur, soulignant les avancées que l'Eglise doit au dernier pape et passant au crible la liste des papabile. Le livre se termine sur les débuts du pontificat de François, toujours confronté aux mêmes questions que son précédesseur, comme l'homosexualité, l'avortement, le mariage des prêtres, et bien sûr les finances vaticanes et une administration supérieure de l'Eglise qui doivent être réformées.

Complété par plusieurs annexes qui donnent le texte intégral de documents importants, le livre est parfois un peu hardu pour qui n'est pas très au fait des finesses de la vie intérieure du Vatican. Mais il a le mérite d'être précis, dense, riche d'informations. Un volume sans aucun doute très utile pour tous ceux qui s'intéressent à ces questions.

Tallandier, Paris, 2015, 253 pages. 18,90 euros.

ISBN : 979-10-210-1007-9.

Vatican
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16 novembre 2014 7 16 /11 /novembre /2014 06:00

Adolphe Sax

Sa vie, son génie inventif, ses saxophones,

une révolution musicale

Jean-Pierre Rorive

Magnifique album biographique superbement illustré en hommage à l'inventeur du saxophone, pour le bicentenaire de sa naissance. Une très belle réalisation à apprécier en ce dimanche.

Un inventeur de saxophone sur un site plutôt consacré à l'histoire des conflits ? Sans hésitation, car la carrière du Belge Adolphe Sax va à plusieurs reprises croiser longuement les armées (françaises en particulier), à travers les évolutions de leurs formations musicales; et cela dès les années 1844-1845. Au-delà du seul saxophone naturellement immédiatement associé à son nom, Sax est en effet à l'origine de la réorganisation totale à partir de 1845 des musiques régimentaires, d'abord à 50 exécutants dans l'infanterie et à 36 dans la cavalerie ; mais l'on apprend que les débats vont se poursuivre pendant l'essentiel du XIXe siècle. Si son influence s'exerce en Belgique, elle est particulièrement importante en France et il est, en particulier, l'un des acteurs les plus remarqués du festival de musiques militaires sur l'hippodrome de Paris en juillet 1846. En dépit des graves difficultés juridiques et financières qu'il doit affronter sous la Monarchie de Juillet et la Seconde République, il poursuit ses efforts sous le Second empire et le livre s'orne de très belles reproductions d'images de l'époque. L'ouvrage se termine sur d'importantes parties consacrées aux différents instruments qui ont bénéficié de l'inventivité de Sax et, bien sûr, sur le saxophone lui-même jusqu'à nos jours. 

S'appuyant sur de très nombreuses et diverses sources d'archives (dont les archives militaires de Vincennes), balayant largement toute la vie et la carrière de son héros, Jean-Pierre Rorive et son éditeur nous fournissent également un volume qui bénéficie d'une iconographie absolument remarquable. Un très bel album de prestige, par le texte autant que par l'image, pour votre bibliothèque.

Gérard Klopp Editeur, Mondorf-les-Bains (L), 2014, 225 pages, 48 euros.

ISBN : 2-911992-76-8

En avant la musique !
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12 novembre 2014 3 12 /11 /novembre /2014 06:15

Le visage des hommes

1914-2014

Marie-Dominique Colas

Sous-titré "Un face-à-face avec le blessé de guerre", ce livre du médecin en chef Marie-Dominique Colas interpelle.

Le récit commence par le témoignage d'une expérience très récente, "un jour de garde, un jour comme les autres dans un hôpital militaire", lorsque un grand blessé revenu d'Afghanistan risque de mourir : "chaque jour, nous serons à ses côtés, l'équipe pluridisciplinaire des soignants, sa femme, sa famille, mais aussi ses camarades et ses chefs qui se relaieront sans relâche". Le récit très personnel qui suit est à la fois celui de la psychiatre, de ses expériences et de son intéraire propre, de ses échanges et dialogues avec les blessés : "Pour les soignants du corps, le psychiatre aurait des outils plus spécifiques pour déchiffrer les signaux de la souffrance". C'est donc un voyage au coeur de l'intime, puisque le visage (défiguré), "c'est la première chose qu'on voit quand on rencontre quelqu'un". Les observations médcales et humaines sont nombreuses, autant que les retranscriptions de dialogues avec les patients, dans ce livre organisé en quatre grandes parties : "L'énigme du corps", "Le visage défiguré, les Gueules cassées", "Le corps médical face à l'homme mutilé" et, enfin, "Sourire quand même", devise de l'association de ces mêmes Gueules cassées depuis le lendemain de la Grande Guerre. Passant de la Première Guerre mondiale aux conflits les plus actuels via l'Indochine (en particulier Geneviève de Galard), elle n'oublie pas les enseignements d'autres disciplines (la philosophie), explique le traumatisme que constitue la "reconstruction faciale" (finalement, qui suis-je ?) et sait s'interroger avec des mots justes sur les fondamentaux du métier militaire (Pourquoi s'engage-t-on ? Pour quoi -ou pour qui- meurt-on ? La force des solidarité au sein du groupe de camarades, etc.) et met en valeur dans la dernière partie l'importance du réseau associatif constitué autour de l'association des Gueules cassées.

Un livre à la fois émouvant et puissant qui apporte une contribution très utile à notre compréhension de ces drames humains, profondément humains.

Lavauzelle, Panazol, 2014, 245 pages, 24 euros.

ISBN : 978-2-27025-1616-4.

Gueules cassées
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21 septembre 2014 7 21 /09 /septembre /2014 06:15

La guerre des polices n'a pas eu lieu

Gendarmes et policiers, co-acteurs de la sécurité publique

sous la Troisième République (1870-1914)

Laurent Lopez

Voici une étude de référence sur un sujet qui conserve toute son actualité bien au-delà de la période étudiée : les relations entre une force relevant du ministère de l'Intérieur et une autre relevant du ministère de la Guerre dans le maintien de l'ordre public et la sécurité intérieure.

Dans une dense introduction qui présente en particulier l'historiographie de "l'histoire policière", Laurent Lopez explique en particulier l'intérêt de cette étude croisée à une époque charnière. Il développe ensuite son travail en trois grandes parties : "Incarner ou représenter la loi", "Fabriquer ou maintenir l'ordre", "Faire ou être la police judiciaire", au long desquelles thème par thème, sujet par sujet, il aborde toutes les facettes des rapports entre policiers et gendarmes. Procédant toujours par comparaison entre les deux entités, il s'intéresse aussi aux différences entre Paris et la province, au sentiment d'adhésion à la république de l'une et l'autre force, aux passages (individuels) de la gendarmerie à la police, à la collecte du renseignement intérieur. Dans la dernière partie, Laurent Lopez détaille les problématiques particulières de maintien de l'ordre au tournant du XXe siècle avec la crise des attentats anarchistes et donne le récit précis de l'affaire Bonnot. L'auteur souligne en conclusion que dans le temps long le rapprochement progressif entre les deux formations est une constante, une tendance lourde, et qu'il est préférable de parler de complémentarité plutôt que d'opposition, et observe que cette évolution se poursuit durant l'entre-deux-guerres, en reprenant une citation "gendarmique" de l'époque : "La gendarmerie a donc, avant tout, une mission de police à l'intérieur du pays. Par la suite, elle ne saurait être régie par les mêmes règles que les autres armes, qui ont à défendre la patrie contre les ennemis du dehors".

Le livre se termine sur une série d'annexes judicieusement sélectionnées, 25 pages de sources et 12 pages de bibliographie, formant ainsi un vrai ouvrage de référence, complet, sur une question qui ne cesse pas d'agiter les esprits jusqu'au début des années 2000.

Presses universitaires de Paris Sorbonne, 2014, 509 pages, 24 euros.

ISBN : 978-2-84050-932-5.

Ordre public
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7 juin 2014 6 07 /06 /juin /2014 06:20

La santé des populations civiles et militaires

Nouvelles approches et nouvelles sources

Elisabeth Belmas et Serenella Nonnis-Vigilante (Dir.)

Un ouvrage collectif publié il y a quelques années, qui constitue les actes d'un colloque antérieur et présente l'intérêt (rare) de s'intéresser à la santé des populations dans son rapport avec les établissements militaires de santé.

Après la présentation dans une première partie des sources archivistiques et des origines de la santé militaire, la seconde s'intéresse à plusieurs cas particuliers ou situations exceptionnelles : l'hôpital maritime de Rochefort, le rôle du médecin dans les expéditions coloniales, les hôpitaux thermaux militaires ou le service de santé pendant la guerre de Crimée. La troisième partie cherche à établir une comparaison (ou un parallèle) entre la médecine pour les élites et celle destinées aux masses populaires, qu'il s'agisse de l'action d'un éminent professeur ou de la place des hôpitaux parisiens. La dernière enfin traite rapidement des grandes transformations et innovations dans le secteur hospitalier, qu'il s'agisse de l'outre-mer (île Maurice) ou du secteur privé dans l'hexagone.

La situation dramatique des soldats et anciens soldats blessés, réduits durant plusieurs siècles à la misère, a été progressivement prise en compte à partir du règne de François Ier, puis les progrès de la médecine réalisés à partir du XVIIe siècle se diffusent dans l'ensemble de la société. Entre monde militaire et monde civil, les médecins constituent ainsi un lien, un vecteur. Les contributions sont parfois très "pointues", mais l'ensemble forme indiscutablement un solide volume de référence. Si le titre peut sembler très étroit, les thèmes abordés et les références fournies apportent une réelle plus-value.

Editions du Septentrion, Villeneuve d'Ascq, 2010, 311 pages, 23 euros.

ISBN : 978-2-7574-0162-0.

Les premiers hôpitaux... militaires
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2 mai 2014 5 02 /05 /mai /2014 06:25

Felice Beato

(1832-1909)

Aux origines de la photographie de guerre

Catherine Pinguet

Vous vous intéressez à la conquête coloniale ? Vous voulez revoir les campagnes britanniques du XIXe siècle ? Voila le livre qu'il vous faut !

Entre le premier conflit qu'il couvre, la guerre de Crimée à l'âge de 23 ans, et les opérations de pacification en Haute-Birmanie, qu'il suit alors qu'il est âgé de presque 60, il nous entraîne en Inde, en Chine, au Japon, en Corée, au Soudan. Catherine Pinguet le suit tout au long de ses voyages professionnels, replace les prises de vues dans leur contexte (et explique ainsi comment il faut aborder la photographie de guerre), cite de très nombreux échanges avec ses différents interlocuteurs ou correspondants, aborde la question de l'utilisation de la photo pour le repérage et la préparation du terrain. Elle décrit aussi les scènes de pillages et la répression qui suivent l'arrivée des troupes britanniques à de nombreuses reprises ou nous explique l'avènement de l'ère Meiji au Japon en 1868. Le tout est très largement illustré de photos prises par Beato pour les journaux au profit desquels il travaille et les principales (ou les plus représentatives) sont décryptées.

Le récit d'une carrière donc, mais aussi une leçon d'analyse de la photo (de guerre), aussi bien dans ce quelle représente que dans ses caractéristiques techniques. Cette vie autour de monde de Felice Beato, reconstituée, "permet de constater comment l'armée britannique des années 1855-1860, instrumentalise un aventurier qui ne demande pas mieux que de photographier ce que ses commenditaires souhaitent montrer". Car si la photo ne ment pas dans ce qu'elle représente factuellement et ponctuellement, tout dépend en réalité de son contexte, de ce que le photographe a voulu faire regarder et de la "mise en scène" éventuelle qu'il a conçu. Un ouvrage qui touche à l'histoire militaire, à l'ethnographie et à la découverte de sites et monuments dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Un livre tout particulièrement intéressant et agréable à lire comme à feuilleter.

CNRS Editions, Paris, 2014, 255 pages, 25 euros.
ISBN : 978-2-271-07885-8.

Premier photographe de guerre
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24 avril 2014 4 24 /04 /avril /2014 06:20

Le mythe grec allemand

Histoire d'une affinité élective

Anthony Andurand

Voici un pur produit, et des plus passionnants, de la recherche académique, dont la publication fait honneur à l'éditeur.

Le sujet comme son traitement (l'ouvrage est néanmoins parfois ardu pour un non initié et demande quelques connaissances préalables) n'aurait sans doute pas intéressé un "grand éditeur" dont le catalogue est essentiellement structuré à partir de préoccupations (légitimement) commerciales. Il est donc important que des structures comme les presses universitaires poursuivent leur politique de publication d'ouvrages théoriques de qualité et de référence. En fait, Anthony Andurand s'intéresse ici à la réception (ou aux réceptions successives) en Allemagne de l'Antiquité grecque et à la relation particulière que les intellectuels allemands ont entretenu pendant deux siècles avec l'hellénisme. Cette quasi "appropriation" durant de longues périodes de l'ancienne histoire grecque par l'université allemande a dans le même temps des conséquences sur l'ensemble des élites européennes et, parfois, sur le discours politique allemand lui-même, ou au moins sur une certaine conception du monde . Passant de la fin du XVIIIe siècle qui voit naître puis se développer à la fois le romantisme et le sentiment d'unité nationale outre-Rhin, à l'empire wilhelmien puis à Weimar et au IIIe Reich, l'auteur détaille les interprétations et analyses qui se succèdent à partir des écrits des plus grands antiquisants de leur époque, leur écho dans la philosophie et la littérature germaniques, leur influence y compris sur les fondamentaux du système éducatif. Mais au fait, comment expliquer cet attrait allemand pour la Grèce, alors que les autres pays européens se revendiquent plus facilement de Rome ? L'émiettement des cités, qui rappelle la division des Etats allemands, et a contrario dans les deux cas une forte communauté linguistique et culturelle. Les pages sur l'analyse de la philosophie platonicienne, sur le "mythe macédonien" en Prusse, sur l'aménagement de Munich avec ses monuments "néo-grecs", sur la notion de "liberté" (individuelle et communautaire), sur le rapport à Nietzsche ou son influence sur le "Kulturkrieg" sont très souvent excellentes.

De nombreuses citations ("La guerre du Péloponnèse fut pour le microcosme grec ce que le conflit actuel est aujourd'hui pour l'Europe. L'affrontement inluctable de deux visions politiques fondamentalemnt différentes mais pourtant issues d'une même culture, la lutte pour la suprématie économique autant que pour l'hégémonie politique déchirèrent et affaiblirent les puissances qui dominaient le monde grec ... Dès le début, la même amertume, le même déploiement de forces immenses, la même détermination à tenir bon jusqu'au bout", écrit ainsi en 1917 l'helléniste Erich Bethe) parfaitement adaptée au propos chronologique émaillent le texte, complété par une très solide bibliographie. Un livre (trop) discret, mais qui marquera sans doute ce domaine de recherche pour plusieurs années.

Presses universitaires de Rennes, 2014, 403 pages, 22 euros.

ISBN : 978-2-7535-2879-6

Affinité gréco-allemande ?
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Qui Suis-Je ?

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  • : Guerres et conflits XIXe-XXIe s. se fixe pour objectif d’être à la fois (sans prétendre à une exhaustivité matériellement impossible) un carrefour, un miroir, un espace de discussions. Sans être jamais esclave de la « dictature des commémorations », nous nous efforcerons de traiter le plus largement possible de toutes les campagnes, de tous les théâtres, souvent dans une perspective comparatiste. C’est donc à une approche globale de l’histoire militaire que nous vous invitons.
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Cafés historiques de La Chouette

Prochaine séance : pour la rentrée de septembre. Le programme complet sera très prochainement mis en ligne.

Publications personnelles

Livres

 

doumenc-copie-1.jpgLa Direction des Services automobiles des armées et la motorisation des armées françaises (1914-1918), vues à travers l’action du commandant Doumenc

Lavauzelle, Panazol, 2004.

A partir de ma thèse de doctorat, la première étude d’ensemble sur la motorisation des armées pendant la Première Guerre mondiale, sous l’angle du service automobile du GQG, dans les domaines de l’organisation, de la gestion et de l’emploi, des ‘Taxis de la Marne’ aux offensives de l’automne 1918, en passant par la ‘Voie sacrée’ et la Somme.

 

La mobilisation industrielle, ‘premier front’ de la Grande Guerre ? mobil indus

14/18 Editions, Saint-Cloud, 2005 (préface du professeur Jean-Jacques Becker).

En 302 pages (+ 42 pages d’annexes et de bibliographie), toute l’évolution industrielle de l’intérieur pendant la Première Guerre mondiale. Afin de produire toujours davantage pour les armées en campagne, l’organisation complète de la nation, dans tous les secteurs économiques et industriels. Accompagné de nombreux tableaux de synthèse.

 

colonies-allemandes.jpgLa conquête des colonies allemandes. Naissance et mort d’un rêve impérial

14/18 Editions, Saint-Cloud, 2006 (préface du professeur Jacques Frémeaux).

Au début de la Grande Guerre, l’empire colonial allemand est de création récente. Sans continuité territoriale, les différents territoires ultramarins du Reich sont difficilement défendables. De sa constitution à la fin du XIXe siècle à sa dévolution après le traité de Versailles, toutes les étapes de sa conquête entre 1914 et 1918 (388 pages, + 11 pages d’annexes, 15 pages de bibliographie, index et cartes).

 

 caire damasDu Caire à Damas. Français et Anglais au Proche-Orient (1914-1919)

 14/18 Editions, Saint-Cloud, 2008 (préface du professeur Jean-Charles Jauffret).

Du premier au dernier jour de la Grande Guerre, bien que la priorité soit accordée au front de France, Paris entretient en Orient plusieurs missions qui participent, avec les nombreux contingents britanniques, aux opérations du Sinaï, d’Arabie, de Palestine et de Syrie. Mais, dans ce cadre géographique, les oppositions diplomatiques entre ‘alliés’ sont au moins aussi importantes que les campagnes militaires elles-mêmes.

 

hte silesieHaute-Silésie (1920-1922). Laboratoire des ‘leçons oubliées’ de l’armée française et perceptions nationales

‘Etudes académiques », Riveneuve Editions, Paris, 2009.

Première étude d’ensemble en français sur la question, à partir du volume de mon habilitation à diriger des recherches. Le récit détaillé de la première opération civilo-militaire moderne d’interposition entre des factions en lutte (Allemands et Polonais) conduite par une coalition internationale (France, Grande-Bretagne, Italie), à partir des archives françaises et étrangères et de la presse de l’époque (381 pages + 53 pages d’annexes, index et bibliographie).

 

cdt armee allde Le commandement suprême de l’armée allemande 1914-1916, édition annotée et commentée des souvenirs de guerre du général von Falkenhayn 

14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2010.

Le texte original de l’édition française de 1921 des mémoires de l’ancien chef d’état-major général allemand, accompagné d’un dispositif complet de notes infrapaginales permettant de situer les lieux, de rappeler la carrière des personnages cités et surtout de comparer ses affirmations avec les documents d’archives et les témoignages des autres acteurs (339 pages + 34 pages d’annexes, cartes et index).

 

chrono commChronologie commentée de la Première Guerre mondiale

Perrin, Paris, 2011.

La Grande Guerre au jour le jour entre juin 1914 et juin 1919, dans tous les domaines (militaire, mais aussi politique, diplomatique, économique, financier, social, culturel) et sur tous les fronts. Environ 15.000 événements sur 607 pages (+ 36 pages de bibliographie et d’index).

 

 Les secrets de la Grande Guerrecouverture secrets

Librairie Vuibert, Paris, 2012.

Un volume grand public permettant, à partir d’une vingtaine de situations personnelles ou d’exemples concrets, de remettre en lumière quelques épisodes peu connus de la Première Guerre mondiale, de la question du « pantalon rouge » en août 1914 à l’acceptation de l’armistice par von Lettow-Vorbeck en Afrique orientale, après la fin des hostilités sur le théâtre ouest-européen.

 

Couverture de l'ouvrage 'Mon commandement en Orient'Mon commandement en Orient, édition annotée et commentée des souvenirs de guerre du général Sarrail

14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2012

Le texte intégral de l'édition originale, passé au crible des archives publiques, des fonds privés et des témoignages des acteurs. Le récit fait par Sarrail de son temps de commandement à Salonique (1915-1917) apparaît véritablement comme un exemple presque caricatural de mémoires d'autojustification a posteriori

 

 

Coordination et direction d’ouvrages

 

Destins d’exception. Les parrains de promotion de l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr

SHAT, Vincennes, 2002.

Présentation (très largement illustrée, 139 pages) des 58 parrains qui ont donné leur nom à des promotions de Saint-Cyr, entre la promotion « du Prince Impérial » (1857-1858) et la promotion « chef d’escadrons Raffalli » (1998-2001).

 

fflLa France Libre. L’épopée des Français Libres au combat, 1940-1945

SHAT, Vincennes et LBM, Paris, 2004.

Album illustré présentant en 191 pages l’histoire et les parcours (individuels et collectifs) des volontaires de la France Libre pendant la Seconde guerre mondiale.

 

marque courageLa marque du courage

SHD, Vincennes et LBM, Paris, 2005.

Album illustré présentant en 189 pages l’histoire des Croix de Guerre et de la Valeur Militaire, à travers une succession de portraits, de la Première Guerre mondiale à la Bosnie en 1995. L’album comporte en annexe une étude sur la symbolique, les fourragères et la liste des unités d’active décorées.

 

  90e anniversaire de la Croix de guerre90-ANS-CROIX-DE-GUERRE.jpg

SHD, Vincennes, 2006.

Actes de la journée d’études tenue au Musée de l’Armée le 16 novembre 2005. Douze contributions d’officiers historiens et d’universitaires, français et étrangers, de la naissance de la Croix de guerre à sa perception dans la société française, en passant les décorations alliées similaires et ses évolutions ultérieures.

 

france grèceLes relations militaires franco-grecques. De la Restauration à la Seconde guerre mondiale 

SHD,Vincennes, 2007.

Durant cette période, les relations militaires franco-grecques ont été particulièrement intenses, portées à la fois par les sentiments philhellènes qui se développent dans l’hexagone (la France est l’une des ‘Puissances protectrices’ dès la renaissance du pays) et par la volonté de ne pas céder d’influence aux Anglais, aux Allemands ou aux Italiens. La campagne de Morée en 1828, l’intervention en Crète en 1897, les opérations en Russie du Sud  en 1919 constituent quelques uns des onze chapitres de ce volume, complété par un inventaire exhaustif des fonds conservés à Vincennes.

 

verdunLes 300 jours de Verdun

Editions Italiques, Triel-sur-Seine, 2006 (Jean-Pierre Turbergue, Dir.).

Exceptionnel album de 550 pages, très richement illustré, réalisé en partenariat entre les éditions Italiques et le Service historique de la Défense. Toutes les opérations sur le front de Verdun en 1916 au jour le jour.

 

DICO-14-18.jpgDictionnaire de la Grande Guerre

(avec François Cochet), 'Bouquins', R. Laffont, 2008.

Une cinquantaine de contributeurs parmi les meilleurs spécialistes de la Grande Guerre, 1.100 pages, 2.500 entrées : toute la Première Guerre mondiale de A à Z, les hommes, les lieux, les matériels, les opérations, les règlements, les doctrines, etc.

 

fochFerdinand Foch (1851-1929). Apprenez à penser

(avec François Cochet), 14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2010.

Actes du colloque international tenu à l’Ecole militaire les 6 et 7 novembre 2008. Vingt-quatre communications balayant tous les aspects de la carrière du maréchal Foch, de sa formation à son héritage dans les armées alliées par des historiens, civils et militaires, de neuf nations (461 pages + 16 pages de bibliographie).

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