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5 juillet 2013 5 05 /07 /juillet /2013 06:42

Un vigoureux plaidoyer reçu hier, un "cri du coeur" d'un grand historien qui a passé des semaines, des mois, des années à travailler sur les archives de Vincennes (on se souvient de sa Guerre d'Algérie par les documents), qui a lancé des milliers de mémoires et des centaines de thèses d'histoire militaire et défense, et sait donc parfaitement de quoi il retourne.

 

 PLAIDOYER POUR UN COMMANDEMENT UNIQUE AU SHD


La raison pour laquelle les universitaires fréquentent de moins en moins le SHD tient d'abord à une question tactique, puis à une question de fond.

La première concerne l'incroyable temps perdu et les démarches fastidieuses, avec demande d'un mois, pour consulter cinq malheureux cartons par jour, dont on ne peut au préalable deviner l’éventuelle richesse. Alors que les services américains, britanniques ou allemands facilitent l'accès aux archives, nous, professeurs d'université, constatons qu'en raison du manque chronique de personnel le SHD ressemble à un parcours du combattant pour un chercheur. Ce qui explique que moi-même et bien d'autres collègues nous donnons de moins et moins de sujets de mémoire de master ou de thèse dépendant du corpus de Vincennes. De principales, les archives de Vincennes deviennent simplement complémentaires. Je passe sur les critiques virulentes entendues de la part de collègues étrangers et de la perte d'image...

En fait, et j'ai pu le distinguer depuis mes premières recherches à Vincennes en 1972, la question de fond vient d'une méconnaissance des archives militaires par les conservateurs civils. Le jour où ils ont pris le pouvoir, le SHD a changé d'âme. Ainsi, les JMO que j'ai consultés sur 39-45 ou la guerre d'Algérie, auparavant en consultation libre, sont soumis à dérogation. Cela n'est pas admissible, surtout comparé aux archives de la justice militaire, aux archives judiciaires civiles, ou aux archives de la police ! En outre, vécu par quelques-uns de mes étudiants depuis dix ans environ, faire de l'histoire militaire a quelque chose d'étrange à Vincennes quand on passe par le canal des conservateurs…

Or, il s'agit bien du Service HISTORIQUE de la Défense. Tous les pouvoirs de décision et d'organisation devraient revenir à son seul chef militaire, « facilitateur » du travail de ses subordonnés et des chercheurs extérieurs. Ce service est interactif, il doit produire des études pour le ministère de la Défense, souligner les leçons des RETEX à chaque campagne, et elles deviennent nombreuses depuis l'engagement dans les Balkans. Il est tout à fait anormal que la longue lignée des officiers-historiens de qualité, dans l'esprit du général Jean Delmas, soit à ce point négligée, et pour leur avancement et pour le manque de considération dont ils pâtissent. Autre anomalie, pour le moins étrange, qui montre une nouvelle fois que le ministère de la Défense ne sait pas gérer ses richesses en hommes : on trouve dans différents postes en province, où ils perdent souvent leur temps, des conservateurs officiers ayant fait l’école du Patrimoine, dont la place de droit devrait être à Vincennes.

Dès lors que le politique a décidé le regroupement des services, il faut un seul chef, militaire, et une définition claire des missions. Les dyarchies, quelles qu'elles soient, conduisent à l'impasse. Foch, généralissime unique des alliés a donné la victoire à la coalition. Toute chose étant égale par ailleurs, il faut revenir à cette cohérence de l’organisation et à cet esprit volontariste, en affirmant la forte personnalité du SHD sous commandement militaire, puisque comme le nom l’indique, il s’agit bien de la Défense.


Professeur Jean-Charles Jauffret
Directeur du département d'histoire de Sciences Po Aix

PLAIDOYER POUR UN COMMANDEMENT UNIQUE AU SHD


La raison pour laquelle les universitaires fréquentent de moins en moins le SHD tient d'abord à une question tactique, puis à une question de fond.

 La première concerne l'incroyable temps perdu et les démarches fastidieuses, avec demande d'un mois, pour consulter cinq malheureux cartons par jour, dont on ne peut au préalable deviner l’éventuelle richesse. Alors que les services américains, britanniques ou allemands facilitent l'accès aux archives, nous, professeurs d'université, constatons qu'en raison du manque chronique de personnel le SHD ressemble à un parcours du combattant pour un chercheur. Ce qui explique que moi-même et bien d'autres collègues nous donnons de moins et moins de sujets de mémoire de master ou de thèse dépendant du corpus de Vincennes. De principales, les archives de Vincennes deviennent simplement complémentaires. Je passe sur les critiques virulentes entendues de la part de collègues étrangers et de la perte d'image...

En fait, et j'ai pu le distinguer depuis mes premières recherches à Vincennes en 1972, la question de fond vient d'une méconnaissance des archives militaires par les conservateurs civils. Le jour où ils ont pris le pouvoir, le SHD a changé d'âme. Ainsi, les JMO que j'ai consultés sur 39-45 ou la guerre d'Algérie, auparavant en consultation libre, sont soumis à dérogation. Cela n'est pas admissible, surtout comparé aux archives de la justice militaire, les archives judiciaires civiles, ou les archives de la police ! En outre, vécu par quelques-uns de mes étudiants depuis dix ans environ, faire de l'histoire militaire a quelque chose d'étrange à Vincennes quand on passe par le canal des conservateurs…

Or, il s'agit bien du Service HISTORIQUE de la Défense. Tous les pouvoirs de décision et d'organisation devraient revenir à son seul chef militaire, « facilitateur » du travail de ses subordonnés et des chercheurs extérieurs. Ce service est interactif, il doit produire des études pour le ministère de la Défense, souligner les leçons des RETEX à chaque campagne, et elles deviennent nombreuses depuis l'engagement dans les Balkans. Il est tout à fait anormal que la longue lignée des officiers-historiens de qualité, dans l'esprit du général Jean Delmas, soit à ce point négligée, et pour leur avancement et pour le manque de considération dont ils pâtissent. Autre anomalie, pour le moins étrange, qui montre une nouvelle fois que le ministère de la Défense ne sait pas gérer ses richesses en hommes : on trouve dans différents postes en province, où ils perdent souvent leur temps, des conservateurs officiers ayant fait l’école du Patrimoine, dont la place de droit devrait être à Vincennes.

Dès lors que le politique a décidé le regroupement des services, il faut un seul chef, militaire, et une définition claire des missions. Les dyarchies, quelles qu'elles soient, conduisent à l'impasse. Foch, généralissime unique des alliés a donné la victoire à la coalition. Toute chose étant égale par ailleurs, il faut revenir à cette cohérence de l’organisation et à cet esprit volontariste, en affirmant la forte personnalité du SHD sous commandement militaire, puisque comme le nom l’indique, il s’agit bien de la Défense.


Professeur Jean-Charles Jauffret
Directeur du département d'histoire de Sciences Po Aix

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2 juillet 2013 2 02 /07 /juillet /2013 06:50

Le général André Bach, dont les travaux de référence sur la Première Guerre mondiale sont unanimement appréciés, a adressé hier matin à plusieurs sites (mise en ligne sur Theatrum Belli -ici-) cette "lettre ouverte", long témoignage et analyse de la situation du SHD, qu'il nous semble impossible de ne pas publier intégralement pour que l'information de tous soit complète. Venant d'un tel spécialiste, qui multiplie les exemples vécus et donne à la fois de la chair et de la densité à l'analyse, le tout mérite d'être réfléchi.

 

Mais que se passe-t-il à Vincennes ?

Deux articles successifs sur le blog Défense ouverte de Jean Guisnel m’imposent de réagir

Professeur durant 3 ans à l’Ecole de Guerre dont une année comme chef du cours Stratégie Histoire militaire, chef du Service Historique de l’Armée de Terre de 1997 à 2000, par ailleurs adjoint communication du Gouverneur militaire de Paris en 1990-1992 et n°2 du Service de Relations Publiques des Armées dans la période de fou que fut la compétition électorale Chirac-Balladur, je me dois de dire : Halte à la désinformation !

Résumons ces deux articles

Le général chef du Service Historique de la Défense aurait par sa maladresse et son non respect de la loi sur la communication des archives amené le service qu’il dirigeait au bord de l’explosion, une partie du personnel lui reprochant l’illégalité de son comportement.

L’article se veut sérieux, car il serait issu de rencontres successives d’« un très bon connaisseur du dossier », d’historiens "qui craquent", de gens qui lui ont dénoncé les liens très "étroits" liant au SHD les contrôleurs généraux des Armées Bodin et Lucas, respectivement SGA et directeur DMPA, d’un général cinq étoiles mécontent, d’une "source  très proche du SHD" qui aurait dit de manière sibylline qu’il fallait « traiter ces affaires de manière exactement inverse à ce qui s’est passé », etc. Bref, une enquête… Cette dernière source ne précise d’ailleurs pas ce qu’aurait été cette manière inverse, ce qui nous permet d’évoquer l’adage selon lequel le capitalisme est l’exploitation de l’homme par l’homme et le communisme exactement le contraire. Dans le deuxième article concernant les archives du massacre de Thiaroye, une « autorité militaire du SHD associée à un directeur de cabinet ministériel »  ( ! ) aurait pris une décision intempestive dénoncée heureusement grâce au civisme et à la connaissance des lois des archivistes. C’est un vrai jeu de piste pour retrouver les personnes évoquées.

Pourquoi ces "sources" éprouvent-elles le  besoin de rester à couvert ? Sont-elles des "gorges profondes" ou des personnels qui craignent pour leur vie ou leur carrière dans un milieu où semble régner une sorte de "police politique militaire" ? En journalisme comme en recherche historique, le ba-ba est de citer ses sources sauf si cela les met en danger. Est-ce donc le cas ? Le journaliste dans cet article a-t-il pris le soin de recueillir la version du général et du conservateur en chef, leur a-t-il téléphoné pour leur dire qu’il allait publier et leur accorder éventuellement un droit de réponse ?  Même si  le droit de réserve lui était opposé, il pouvait éventuellement leur donner le statut de source anonyme après avoir échangé avec eux. A-t-il pris contact avec ceux qui connaissent bien le SHD ? Ceux qui y travaillent ? Nul ne le sait.

Donc je pèse mes mots : enquête bâclée, colportage de ragots avec, pour un professionnel, facilité de savoir au vu des rumeurs colportées qui a alimenté en « infos » Jean Guisnel. L’enquête est à refaire et je vais la faire ci-dessous en m’appuyant sur mon expérience de trois ans passés à Vincennes et de ce que j’en ai su depuis, grâce aux relations de qualité que j’ai gardées avec le personnel civil de la défense encore en place au château, du fait du souvenir d’un travail en commun qui a été générateur de satisfactions. Aujourd’hui, ils sont démotivés.

Mon expérience à la tête du SHAT ( 1997-2000)

En 1997, prenant la tête du service en venant du cabinet du chef d’état-major des Armées, j’étais bien conscient des réformes à entreprendre dans le cadre de la refondation des armées  et du passage à un modèle d’armée professionnelle, le tout sur fond de réduction drastique du budget de la défense. Contrairement à d’autres, je prônais dès lors la fusion des différents services d’armée : Terre, Mer, Air, Gendarmerie et le rattachement à l’administration du ministère de la Défense, compte tenu du fait que les Armées se recentraient sur leur capacité opérationnelle et n’avaient plus de budget pour subvenir au fonctionnement de ces services.

J’ai donc vécu une période intermédiaire, où je gardais un contact avec le chef d’état-major de l’armée de Terre et, pour les affaires délicates, celui, soit du Secrétaire général pour l’administration Jean-François Hebert, soit celui  du cabinet du ministre ou du ministre lui-même, Alain Richard. Pourquoi ces contacts ? Parce que les archives déposées à Vincennes conservent la trace de la politique générale de l’Etat et que la publication trop hâtive de certaines de celles-ci peut, pour l’instant, parfois gêner la liberté d’action diplomatique, l’instrumentalisation par d’autres pays de documents savamment présentés  traitant par exemple du nucléaire qui est un des rares domaines d’une politique indépendante, de la guerre d ‘Algérie sous différentes facettes, plus près de nous du Rwanda, etc.. Tous sujets source de complications certaines. Il est sûr comme l’a dit Racine «  qu’il n’est pas de secret que le temps ne révèle », et cela est l’exacte vérité si le secret a été correctement archivé et bien conservé. La tâche du SHD est justement de veiller à ce que ces documents sensibles entrent bien au SHD, qu’ils y soient conservés dans les conditions de sécurité requises jusqu’au moment où la loi sur les archives autorise leur libre accès à tout un chacun. Ce lien direct a d’ailleurs servi plus souvent à faire ouvrir des archives que la sous-direction du Cabinet, frileusement, empêchait, contrairement à mes propositions. Ainsi, avec l’appui d’une lettre du professeur Jauffret, on a pu débloquer auprès du ministre la sortie d’un tome présentant des documents sur les débuts de l’insurrection algérienne, demande refusée préalablement par le cabinet. Il en a été de même pour débloquer 200 cartons de documents produits par les willayas, fermés normalement à la consultation, au bénéfice du professeur Gilbert Meynier, en cours de recherche sur l’histoire du FLN. Le livre qui en est issu est devenu un classique, apprécié par les chercheurs tant en France qu’en Algérie. Naturellement, dès lors, ces cartons ont été mis en consultation libre. Les seules exceptions ont été pour les cartons dans lesquelles apparaissaient des noms de personnes qui, du fait de leur activité non connue publiquement, au profit de l’armée française, risquaient, elles ou leurs descendants, d’être victimes de vengeances ou représailles. J’ai mis pendant plusieurs mois un officier à temps plein pour cet examen minutieux et délicat des cartons, pour assurer cette sécurité. J’ai pris sur moi d’ouvrir à la consultation des dossiers de Justice Militaire au profit du chercheur Nicolas Offenstadt, au vu de la qualité de ses travaux, alors que là aussi on faisait lanterner la décision d’autorisation sur de longs mois avec des arguties irrecevables. En revanche, j’ai fait pilonner un inventaire sur les fonds du SGDN en observant que la loi n’était pas respectée, les documents à consultation retardée par la loi n’ayant pas été indiqués avec l’astérisque réglementaire. J’ai fait mettre en bastion protégé des dossiers laissés jusque là à la portée de beaucoup.

Je me suis donc conduit comme le général Paulus, et pourtant tout se passait bien. Tout au plus à mon arrivée, j’ai constaté que les conservateurs n’étaient pas utilisés au mieux de leur compétence. Soucieux de professionnalisation, j’ai donc mis  à la tête de la salle de consultation un conservateur et j’ai recruté un autre jeune conservateur pour prendre la responsabilité de la bibliothèque tenue jusqu’alors par un personnel non issu de l’Ecole des Chartes. Pour la partie archives, j’avais affaire au conservateur en chef Philippe Schillinger, homme de haute culture historique, pour lequel mon estime s’est vite transformée en amitié. Au-delà des chartistes, je me suis démené pour conserver de talentueux contractuels, en situation précaire de ce fait. Je n’en cite qu’un, pour lequel j’ai du, pour le conserver, batailler ferme avec la direction des ressources humaines du ministère : Hervé Lemoine. Le fait qu’il soit devenu directeur des archives au ministère de la Culture montre que j’ai eu raison de m’impliquer dans sa titularisation. Je me plais à rendre hommage à Jean-Pierre Hébert et à Alain Richard, homme de culture, doté d’un bagage historique impressionnant. Mon dernier contact avec Alain Richard a été, à mon départ en retraite, sa demande d’enquêter et de lui remettre un rapport sur l’enseignement de l’histoire pour la formation des officiers à Saint-Cyr, Navale , Salon et dans les écoles militaires  homologues allemandes et britanniques..

Qu’a-t-il bien pu se passer pour que cette cohabitation harmonieuse d’historiens militaires et de conservateurs se soit transformée, apparemment, en un chaudron de sorcières avec crises de nerfs à l’appui.

Réponse de l’article : c’est la faute du Général Paulus. Là je réponds non et je l’expliciterai plus loin. Alors, quelles sont les causes profondes comme dirait un de mes maîtres intellectuels  en  histoire,  Pierre Renouvin ?

Raison du gâchis

Pour moi la cause essentielle réside dans le ratage du rattachement du Service à l’administration de la Défense lors de la perte de tutelle des armées. Cette administration ne l’a pas accueillie en mère, mais en marâtre. Tout le monde était d’accord pour regrouper les fonctions "recherche historique" et "conservation des archives" de chaque armée en un seul service, la division par armées étant  archaïque et totalement obsolète. Il fallait l’autorité ministérielle pour enjoindre cette fusion qui heurtait les habitudes. Cela s’est fait, est derrière nous et a réussi, ce qui n’était pas évident, tellement cela bousculait les particularismes. Le ratage n’est pas à ce niveau et il est tout d’abord du au manque de réflexion des enjeux, à une  approche purement administrative d’une question qui méritait une approche fine au moment du passage à l’armée professionnelle.

Il est temps d’expliquer ce qu’est le SHD et d’où il vient. Il est le résultat d’un fort volontarisme des pères de la III° République. Pour créer le lien entre la Nation et son Armée, un des grands projets politiques du nouveau régime, et en parallèle, républicaniser l’armée,  il a été donné à des chercheurs historiens militaires la mission de se plonger dans les archives militaires conservés depuis le 17°siècle, pour créer une filiation essentiellement avec la saga des armées révolutionnaires et impériales. Il s’agissait de gommer la période Restauration-2° Empire, où l’Armée avait été au service de régimes réactionnaires, les mettant parfois en place par la violence. Mission a été accomplie. Valmy, la Patrie en danger ont été revisités. Une symbolique militaire en concordance avec ce nouvel apprentissage civique a été instituée. L’étude de la guerre de 1870 et l’effort du Gouvernement de Défense Nationale ont été mis en exergue à partir des archives. Rémy Porte a signalé le gigantesque effort qu’a constitué, entre les deux guerres la mise au clair de l’action des armées pendant la Grande Guerre, travail exceptionnel (110 volumes) car à côté du texte rédigé dont tout historien doit se méfier, il y a en regard l’intégralité des documents cités, qui permettent le recoupement.
C’est cet aspect, véritable raison d’être du SHD, qui a totalement été insuffisamment perçu. Le Service Historique a une fonction « politique » au sens noble du terme, développer le lien entre la nation et son armée. Or, à l’échelle historique, la rétraction en armée professionnelle est toute récente et c’est actuellement, justement, qu’il y a un besoin accru d’accompagner par la recherche historique ce phénomène de rupture extraordinaire qu’a été la suspension de la conscription, afin de se projeter dans un nouveau modèle de relation armée-nation au moment où la présence physique de l’Armée ne subsiste plus que dans un nombre infime de garnisons.

En dehors de cela, l’histoire militaire, trop souvent absente  de la recherche universitaire, est un outil de formation très important à condition de remettre sans arrêt en question la relation des événements. Toutes les armées qui ont encore un savoir-faire reconnu en Occident utilisent ce moyen de formation de leurs cadres. Citons les principales : américaine, britannique, allemande et française. Chef du cours Stratégie Histoire militaire de l’Ecole de Guerre, j’ai été accueilli  en 1993 à Fort Leavenworth, école ayant la même mission de formation, par mon homologue, colonel comme moi. S’étant enquis de mon effectif, j’avouais un adjoint. Il me montra alors le trombinoscope de ses collaborateurs, tous historiens : 50.

Le passage à l’armée professionnelle sous contrainte budgétaire a déjà vidé le vivier des enseignants chercheurs présents alors à Vincennes. Leur action était décuplée par la présence d’appelés du contingent de haut niveau intellectuel, précieux auxiliaires qui ont disparu. L’enseignement de l’histoire militaire à l’Ecole de Guerre a été confié au SHD, avec une poignée de chercheurs, le plus faible ratio, et de loin, de toutes les armées occidentales, dans un pays qui, paraît-il, aime l’histoire et ne jure que par elle.

Personne de bonne foi ne peut contester le fait qu’en dépit de la transformation  accélérée des armées, les missions confiées à celles-ci ont été remplies par nos officiers avec succès et doigté durant ces dix dernières années. C’est dû, en particulier, à cette formation qui fournit un type de comportement à l’officier en lui montrant par des exemples historiques soigneusement « décortiqués » ce qu’il doit être, formation que viennent chercher en nombre nos stagiaires étrangers. Personne ne sait qu’un officier historien, à l’initiative du général Paulus suit l’opération du Mali au Centre opérationnel des armées, qu’il y  a peu de temps il était sur le terrain pour examiner la bonne collecte des ordres donnés en vue des futures études d’histoire et qu’il a sur place donné aux officiers des conférences pour leur faire connaître, par exemple, la façon dont on s’était débarrassé des insurrections de 1916-1917 en ces lieux, à partir des comptes-rendus des acteurs de ces opérations. L’efficacité et l’excellence est à ce prix, autant sinon plus que dans l’efficacité de l’armement. Comprendre un pays, retrouver sa mémoire, qui dans ces milieux est essentiellement orale et perdure avec force, donne de la capacité à agir en faisant preuve d’intelligence de situation, en réfléchissant par exemple ici au comportement des Touaregs, hier et aujourd’hui, alors que les conditions de vie et de rapport entre populations différentes ont beaucoup à voir avec le temps passé.

Le dérapage

C’est cette dimension qui a été mal appréhendée. Dépendant, de mon temps, des services du SGA, je n’ai pas connu l’installation de la  tutelle désormais en charge  du SHD : La Direction de la mémoire, du patrimoine  et des archives. On aurait du se méfier dès le choix de ce titre. L’historien que je suis devenu fronce toujours le sourcil au mot "Mémoire" qui, non seulement n’est pas scientifique, mais évoque quand même un peu, disons-le pudiquement, le « discours officiel ». Dans le même ordre d’idée, la découverte dans l’organigramme d’une fonction «  produits culturels » éveille aussi un peu l’attention. Quand j’étais au SIRPA, on finançait aussi des «  produits culturels » mais, là, il n’y avait pas de faux nez. On était là pour faire de la communication institutionnelle. Ensuite, le mot qui apparaît fortement est "archives". Il est légitime que l’administration de la Défense s’y soit intéressée. Cela a été un progrès car la Défense a des dépôts dispersés dans toute la France et il était indispensable de professionnaliser toute la chaîne. A l’époque, quand j’échangeais avec mon homologue canadien, les courriers étaient estampillés « Service Histoire et Patrimoine ». Cela n’a pas été le cas en France.  On a donc mis en place une tutelle pour gérer un service dont la fonction n’était pas inscrite dans l’intitulé générique.

De là, à mon avis, la dérive puisque dans le staff de direction il n’y aucun « référent histoire », avec le niveau de qualification et de compétences requis pour être l’interlocuteur valable à la fois du général SHD et de sa division "Etudes" en interne, et des autorités de tutelle en externe. J’ai pu assister avec consternation à des errements catastrophiques. Ainsi, à une époque, la division "Etudes", composées d’enseignants chercheurs ayant évidemment besoin de conserver leur liberté de recherche, a été mise sous la tutelle de la fonction "conservateurs" pour servir de contributrice à la mise place de  la « valorisation des archives » (en clair le montage d’expositions, ce qui est un contre-emploi évident). La logique des conservateurs est d’ouvrir à la consultation, au titre de service public, les archives, à toute personne qui se présente. La logique d’un centre de recherche, elle, est de conduire des recherches poussées et de favoriser les travaux des chercheurs de haute pointure, nationaux ou étrangers, qui viennent en toute confraternité historienne s’y investir. Pour ce faire, j’avais maintenu  en place un centre de documentation qui permettait d’accueillir ceux qui étaient en train de travailler sur des aspects peu connus de notre histoire militaire, afin de faire progresser notre connaissance de l’action de nos propres armées. Il permettait accessoirement de répondre rapidement aux « questions à 20 centimes » posées par les cabinets pour nourrir les discours officiels. Cette salle a été fermée. Pourtant elle a facilité le travail de Pierre Péan sur Jean Moulin,  celui remarquable de l’Américain Christopher Goscha sur la guerre d’Indochine et accueilli de nombreux chercheurs des pays d’Europe centrale, que l’on a aidé à retrouver leur passé après la chute du Bloc de l’Est. Les remerciements recueillis lors de missions dans ces pays ont montré quel effet de rayonnement a, pour notre pays, de telles actions.
Je peux ajouter les concours apportés pour mettre sur pied des musées d’armées étrangères : tunisienne, marocaine, sénégalaise, par exemple, au nom de notre passé commun lors des deux guerres mondiales.

Je n’attaque pas les hommes qui ont géré administrativement un service aux finalités certainement mal appréhendées par eux et qui n’ont recruté personne de la compétence suffisante pour que la mission du service ne soit pas pervertie. J’imagine bien que la complexité, qu’il ne faut pas cacher, de la gestion des archives  les a incité à se cantonner à ce domaine qu’ils connaissaient mieux, prêtant naturellement l’oreille aux conservateurs, non directement impliqués pour la plupart d’entre eux dans ces autres missions de fond du SHD. Déclarer que la culture de ces deux entités n’est pas la même est enfoncer une porte ouverte…

Qui est responsable de ce ratage ?

Que l’on soit clair. Je ne l’impute pas à l’équipe ministérielle actuelle, qui ne peut que constater le blocage comme elle le fait dans l’échec du service de la solde Louvois. L’échec est dû aux négligences des ministères qui se sont succédé depuis la création de la DMPA et qui se sont désintéressés d’un service d’où, lorsque je le dirigeais, il était possible d’en appeler au ministre directement.

En prenant mes précautions, je m’avance à dire que, s’il y a des rumeurs selon lesquelles les armées seraient en partie co-responsables du ratage Louvois, le ratage SHD, lui, se circonscrit dans l’orbite SGA, car les armées se sont désintéressés de son fonctionnement. Il serait sain de voir comment les cabinets successifs, et au sein de ceux-là ceux qui auraient du veiller à la bonne marche de l’ensemble et au respect de la mission du SHD, n’ont pas rempli leur rôle de 2005 à nos jours.

Résultat : un limogeage de général, au moment où le pays s’apprête à se remémorer la grande guerre  et en particulier 1914 où ont fleuri fusillés et ... généraux limogés.

Spécialiste de cette période et de cette problématique (voir mes ouvrages), je peux dire que pour ces deux types de population, le traitement qui leur a été infligé a gravement attenté à  l’honneur de beaucoup. Le cas du général Regnault, sur lequel je suis en train de travailler, en est un parfait exemple. Ce général, une des têtes de l’état-major général en 1911, conseiller militaire de Jaurès pour ses études  de « Vers l’Armée nouvelle »,  faisait partie du groupe des officiers hostiles à l’offensive à outrance. Dès le 5° jour de combat en août 14, il était limogé. Joffre le poursuivant de sa vindicte, exigeait du ministre Millerand qu’il le force à se déclarer démissionnaire pour raisons de santé. Sur le refus de l’intéressé il était mis disciplinairement à la retraite d’office alors qu’il n’avait pas démérité. Grâce à l’estime de Gallieni, devenu ministre et au fait que Joffre n’avait pas autorité sur l’Armée d’Orient, il y reprenait du service et ce général, mis en retraite d’office pour incapacité à commander une division, commandait fin 1917 une Armée : l’Armée Française d’Orient. Une fois la guerre terminée, en dépit des efforts du Ministère d’alors, le Conseil d’Etat le rétablissait dans ses grades et appellations. Des dossiers de fonds privés remplissent les cartons de Vincennes. Interdits de s’exprimer après-guerre, nombreux sont les officiers qui ont confiés à leurs carnets leur amertume, décrit les injustices subies puis déposé au Service historique leurs histoires encore jamais publiées.
J’avoue avoir réagi avec stupeur quand j’ai appris qu’il avait été enjoint au général Paulus  dernièrement de dire à ses chercheurs de ne pas s’intéresser à cette Grande Guerre sans  une autorisation supérieure, alors qu’un siècle après on en est toujours aux poncifs, aux images d’Epinal et que des centaines de cartons dont beaucoup jamais ouverts emplissent les rayonnages.

Comme alors, on a, en tout cas, un peu le sentiment qu’on fait payer à des « lampistes » les erreurs commises plus haut. Je ne peux manquer de faire l’analogie entre la façon dont ont été traité Regnault et Paulus. La carrière de Paulus plaide pour lui. Conscient des enjeux, dépendant d’une tutelle qui lui a parfois été hostile, il a fait ce qu’il croyait dans sa conscience d’officier devoir faire. Il paye un dysfonctionnement qui n’est pas de son fait. Le mal est fait.

Pourquoi s’exprimer publiquement ?

J’ai toujours eu pour règle de conduite dans toute ma carrière d’essayer de gérer les dossiers sensibles au plus bas bruit possible car, et cela n’a rien à voir avec l’indispensable liberté de la presse, poumon de la démocratie, il est patent que «les medias ne créent pas les problèmes, ils les révèlent et souvent les exacerbent ». Par la tournure de son article, Jean Guisnel ajoute à cette situation pénible des propos attentatoires à l’honneur de Paulus, insistant sur la sanction le privant de son attente légitime eu égard à toute sa carrière. Cela n’est pas supportable et l’attaque étant publique, il faut une réponse publique.

Devant cet échec, que faire ?

Le surmonter (et le moyen de le faire) est au sein du cabinet du ministre. Objectivement, et je n’engage que moi, je suis avec intérêt la gestion du ministère par celui qui est à sa tête actuellement. Lui et ses collaborateurs me semblent des personnalités solides, qui cherchent à réagir face à des pratiques qui ont montré leur dangerosité. C’est en crise que l’on peut le mieux réformer. Or, il faut remettre sur les rails une fonction « Histoire militaire scientifique » au sein du ministère de la Défense, que cette fonction soit suivie et défendue de près, car il en va de la formation de nos cadres et de la mise à la disposition du public d’ouvrages d’histoire militaire de qualité, qui ne sont plus produits par ailleurs. Jeune officier, j’ai servi dans un organisme proche du cabinet de Charles Hernu, le Groupe de planification et d’études stratégiques. (Groupe S). J’y ai connu des « hommes de cabinet » qui m’ont marqué, comme François Heisbourg ou le contrôleur général François Cailleteau. Ils m’ont impressionné par leur capacité de travail, leur intelligence, leur culture en sciences humaines et leur aptitude à mettre en chantier des réformes. François Cailleteau est resté pour moi un exemple de ce qu’est un haut fonctionnaire ayant le sens de l’Etat. Nul doute que leurs successeurs sont à l’œuvre. Que sans à priori, ils repensent l’ensemble. Que ce triste épisode qui rappelle les limogeages de 1914 serve au moins à remettre les choses en ordre.

Reste l’honneur du général Paulus, sali par une présentation déformée de la situation. On sait que Jean Guisnel est à l’origine  de la relève d’un de mes prédécesseurs à la tête du SHAT en 1994. Il n’y a à  cela rien à dire, car il y avait eu faute professionnelle. Chargé de fournir une fiche explicative sur l’affaire Dreyfus dans un service qui détient les pièces originales du dossier d’accusation, ce service avait répondu par une mauvaise fiche tirée de l’équivalent du Quid. Ce n’était pas ce qu’on devait attendre de ce service historique.

Reste qu’avec le général Paulus, on n’est pas dans ce cas. Il va quitter, avec probablement une amertume compréhensible et un sentiment d’injustice profonde, une carrière où il a donné le meilleur de lui-même. Je suis sûr de traduire la pensée de tous nos camarades de la communauté militaire et de tous les historiens qui travaillent sur les archives en disant que, pour nous, il part la tête haute et fournit la plus belle réponse à ceux qui disent que les généraux ne sont que des courtisans, attentifs à plaire à leurs maîtres du moment.

Paulus, tu ne sors pas par la petite porte, tu sors avec honneur. Et l’on se retrouve en toi.

Général ( 2S) André Bach

Promotion de Saint-Cyr Lt-Colonel  Driant  1965-1967

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29 juin 2013 6 29 /06 /juin /2013 06:50

Crise au SHD ?

Entre ignorance et mauvaise foi des commentateurs

J'ai été très étonné de lire, il y a trois jours, sur le site Lepoint.fr, l'article de Jean Guisnel titré "Le général Olivier Paulus et son adjoint exclus du Service historique de la Défense" (ici). Mélange de rumeurs et de sous-entendus, avec un soupçon de mauvaise foi pour faire passer le tout. Sagement, j'ai attendu quarante-huit heures pour voir si une réaction était publiée. Rien. Je passe quelques appels à différents camarades, membres du SHD ou non. Tous sont choqués, mais pour les uns (les militaires le plus souvent) le devoir de réserve interdit de réagir publiquement, tandis que pour les autres (historiens civils et universitaires) il faut y voir la partie visible d'un iceberg de lutte pour le pouvoir aux échelons supérieurs au SHD, ce qui impose d'abord de se faire discret. Bref, le "grand silence des espaces blancs", qui accrédite la thèse publiquement diffusée ! Au bilan, il est tellement facile de "charger" un militaire, sans apporter la moindre précision ou référence !

N'ayant jamais servi sous les ordres du général Paulus et n'étant l'obligé de personne, il me parait normal de rétablir quelques vérités. Analysons donc ce texte, paragraphe par paragraphe, et décryptons-le :

- Le premier paragraphe est globalement exact. Oui, l'atmosphère se dégrade au SHD depuis des mois, oui différentes catégories de personnel travaillent sur le site, oui il y a un conflit d'autorité. Mais, immédiatement, une réserve : il ne s'agit pas d'une opposition (qui serait presque statutaire ou de principe selon l’article) sur les archives entre officiers et conservateurs. Il s'agit des conséquences d'une absence de politique claire, d'un "défaut de gouvernance", comme on dit aujourd'hui. Alors, pourquoi existe-t-il un SHD et à quoi doit servir cet organisme ? Nous y reviendrons à la fin de cet article.

- Le deuxième paragraphe est le plus perfide. Après avoir brossé en quelques lignes la belle carrière du général Paulus, Jean Guisnel "glisse" discrètement que celui-ci aime vraiment beaucoup les décorations "qu'il porte pourtant fort bien", d'ailleurs il n'y a qu'à regarder la photo officielle... Monsieur Guisnel est journaliste de défense depuis assez longtemps pour avoir croisé ces dernières années des dizaines (des centaines ?) d'officiers (et d'autres) portant cinq barrettes complètes ou plus, ce qui n'a rien d'anormal depuis que se multiplient les séjours à l'extérieur et les relèves. Certes, la plupart sont des "commémo" (il n'y a pas si longtemps, un séjour de 6 mois en ex-Yougoslavie donnait la possibilité de recevoir jusqu'à 3 médailles, une tous les deux mois), mais en quoi le général Paulus aurait-il à rougir ou à cacher ces témoignages extérieurs d'une longue carrière ? Jouer sur ce registre est petit et mesquin, j'en parle d'autant plus librement que ceux qui me connaissent savent que je ne porte jamais de décoration.

- Les troisième et quatrième paragraphes insistent sur un aspect très particulier, celui des archives "nucléaires", par nature extrêmement sensibles et protégées. Du croustillant donc ? Or il s'avère que le dossier Jupiter (I puis II) remonte à de longues années déjà et que son traitement exige, par définition, une grande précision ... mais aussi des moyens pour assurer la sécurité. Que le chef du service s'en préoccupe semble on ne peut plus naturel. Il n'y a pas là d'opposition entre des catégories de personnel qui souhaiteraient une ouverture plus ou moins large des archives, mais application de la loi et respect des règlements, et tout particulièrement celles et ceux relatifs à la protection du secret de la Défense nationale qui relève du SGDN sous l'autorité du Premier ministre. Faux problème donc, et surtout ce n'est pas sur ce dossier (dont la quasi-totalité  des cadres du service ne connaissent au mieux que le nom) que "tout le personnel spécialisé détaché du ministère de la Culture s'indigne". Par contre, et il suffit pour s’en rendre compte de discuter sur place avec toute les catégories de personnel, à tous les niveaux hiérarchiques, le conservateur chef des archives de Vincennes a-t-il bien pris en compte les spécificités d'un Service relevant du ministère de la Défense et dont la collecte et la conservation des documents n'est qu'un aspect des savoir-faire, relevant de la mission archivistique à côté de celles attachées aux bibliothèques, à la symbolique et à l'histoire militaire ? Par nature et par fonction, le SHD n’est pas homothétique des Archives nationales. Qu'on le veuille ou non, le SHD n'est pas qu'un service d'archives. Il a, de surcroît, la mission de contribuer à l'écriture de l'histoire des armées et du ministère, et à l'exploiter pour apporter aux autorités et aux unités la connaissance et la compréhension de la chose militaire. Voilà ce qui différencie fondamentalement le SHD des autres services d'archives ministériels. Nous y reviendrons un peu plus loin.

- Le cinquième paragraphe, à partir du cas particulier de ces archives sensibles, généralise hâtivement le discours : les militaires soupçonneraient les conservateurs de "préparer un hold-up" sur leurs archives ! N..de D... ! Un hold-up ! Parlez-en à la poignée de militaires qu’il reste à Vincennes. Pour eux, ce mystérieux hold-up est inutile : ils sont peu-à-peu dépossédés non seulement de l’autorité mais même de leurs propres marges d’initiative.

- Les deux derniers paragraphes mettent en cause les autorités de tutelle, qui ont "négligé" , "étouffé""glissé sous le tapis pendant des mois" ce différent. Belle découverte. Qui a réagit lorsque le général Paulus a, à plusieurs reprises, « tiré la sonnette d’alarme » ? Qui a réagit lorsque le conservateur général qui lui était adjoint s’est adressé directement aux cabinets de la Culture et de la Défense pour critiquer et contester son chef (toute l’université parisienne a été au courant) ? Y a-t-il là quelque chose d'original ou d'atypique dans une haute administration où la règle de base est désormais celle du "Pas de vagues !" ? En résumé, un article qui multiplie les sous-entendus à partir des confidences, selon la formule consacrée, de "sources proches du SHD". Lesquelles ? Personne ne le sait ! Alors posons la question : qui a intérêt à déstabiliser le général chef de service ? Qui aimerait être "calife à la place du calife" ? Selon l'ancienne formule des enquêteurs : à qui profite le crime ?

Revenons donc sur le sujet laissé en suspens et qui constitue, au-delà des situations personnelles, le fond du dossier : pourquoi un Service HISTORIQUE de la Défense ?

La sémantique nous donne une première réponse : il ne s'agit pas du service des archives de la Défense, et l'emploi du mot Historique souligne bien qu'il n'est pas simplement question de collecter, conserver et communiquer des documents. Dès le Directoire, le Dépot de la Guerre, "ancêtre" du SHD, reçoit la double mission de "conserver la mémoire de la nation en armes" ET de contribuer à la formation militaire des officiers en permettant l'étude des campagnes passées. Après 1870, c'est autour des officiers historiens qu'est créé le 2e bureau de l'état-major, c'est le général Lewal qui commande la jeune Ecole supérieure de guerre, ce sont les officiers de la section historique de l'état-major qui animent le renouveau doctrinal. Après 1918, Clemenceau affecte une cinquantaine d'officiers à la rédaction des AFGG (Armées Françaises dans la Grande Guerre), monumentale étude jamais égalée, rédigée à partir des archives primaires et des documents originaux, dont les quelques 110 volumes sont publiés au cours de l'entre-deux-guerres. Depuis toujours, les chercheurs du SHD (officiers et personnel civil) participent à la formation, enseignent dans les écoles, dirigent des études tactiques sur le terrain, rédigent des ouvrages de référence en puisant leurs informations à la meilleure source : les archives. Jusqu'en 2005, tant que chaque service d'armée relevait de son propre état-major, ce lien naturel n'a pas été remis en cause. Depuis la fusion de tous les services en un seul ensemble relevant de la chaîne SGA via la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (et l'on observe ici que le mot "histoire" est absent), ce lien a été sinon rompu, du moins fortement distendu.

Au fur et à mesure du temps, des spécialistes civils des archives ont été affectés au service, leurs compétences reconnues leur permettant d'être des conseillers techniques écoutés du commandement. Peu à peu, la diminution de plus en plus sensible du nombre de militaires à Vincennes a fait son oeuvre : la nature a horreur du vide. Avec la quasi-disparition des officiers historiens qualifiés, le personnel détaché du ministère de la Culture a naturellement imprimé son style, sa marque, ses priorités, ses choix. Et il devient presque "anormal" ou "méprisable" de vouloir étudier les campagnes militaires, contribuer au RETEX, s'intéresser aux opérations passées, récentes, en cours. En clair, les armées ne sont bientôt plus chez elles dans leur propre service d'archives. Voilà l'origine de la crise. Lorsqu'un général souhaite rééquilibrer le dispositif, redonner à l'histoire une utilité et une visibilité, contribuer aux débats en cours, appuyer les opérations, il devient personna non grata dans son propre service, parce qu'il a été "laché" par les autorités de tutelle qui l'on pourtant nommé. Ce n'est pas le général Paulus qui a fragilisé le SHD : ce sont ceux qui, depuis plusieurs années ont détourné le service de l'une de ses missions, qui ont poussé à la réduction dramatique d'une capacité de recherche, qui ont fermé les yeux sur l'abandon de l'une des richesses du ministère. Notons d'ailleurs que le même journaliste, il y a quelques jours, sous le titre "Exclusif : l'armée de terre dénonce une prise de pouvoir de l'administration sur l'opérationnel" (ici), rendait compte d'une réalité quotidiennement vécue. Le problème est du même ordre à Vincennes. Parmi bien d'autres points, le récent rapport de l'amiral Chomel de Jarnieu, inspecteur général des armées pour la Marine, pointe d'ailleurs cette "faiblesse" militaire de Vincennes. Chacun le sait. Personne n'en parle.

N’ayant, je le répète, aucun lien particulier avec le général Paulus, je m’indigne de la réputation, de la fin de carrière, du sort faits à un homme qui a eu le grave défaut de vouloir remettre le navire sur sa voie, et je m’inquiète d’une évolution qui annonce, si l’on n’y prend pas garde, de tristes lendemains.  Alors que faire ? Continuer avec persévérance à défendre une capacité d'étude et d'enseignement au profit des armées. Et donc de recherche, car on ne peut pas admettre que les "officiers historiens du futur" se contentent de recopier et synthétiser plus ou moins bien deux ou trois livres pour dispenser de temps en temps quelques heures de cours. Tout enseignement implique, exige, une recherche. Tout travail au bénéfice d’un état-major nécessite de repartir des archives primaires. Ces officiers doivent non seulement être titulaires de toutes les qualifications universitaires mais aussi, c’est indispensable, s'investir dans les archives, manipuler les dossiers, consulter les documents originaux. C'est à cette indispensable condition qu'ils pourront être utiles à leur institution d'appartenance et que leurs successeurs pourront peut-être rédiger, dans quelques années, les "AFGG de l'an 2000". Encore faudrait-il que les missions soient clairement définies (un petit peu comme à l'armée, désolé !) et que les responsabilités des uns et des autres soient clairement fixées.

Nul doute que nous reparlerons dans l'avenir de ce vaste et important sujet.

N.B. : je n’ai pas abordé ici, du fait du sujet, la délicate question de la communication des archives au public. Tous les universitaires, enseignants-chercheurs, et étudiants parisiens ou provinciaux ont beaucoup à dire sur ce sujet, qui relève totalement du chef des archives de Vincennes A chacun ses responsabilités…

R. PORTE

 

Garder à l'esprit les fondamentaux ...
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22 juin 2013 6 22 /06 /juin /2013 06:47

Opérations

L'histoire en appui

Hervé Drévillon

Beau plaidoyer d'Hervé Drévillon, dans le dernier numéro d'Armées d'Aujourd'hui, en faveur de l'utilisation de l'histoire en appui des opérations. Deux extraits : "Aujourd'hui, c'est un autre danger -celui de l'amnésie- qui guette la pensée militaire. Le lien entre les opoérations en cours et l'histoire des conflits passés s'est considérablement distendu" ; "L'amnésie d'aujourd'hui crée ainsi les conditions de celle de demain. Il n'y a, à cela, aucune fatalité".

Redéployer et employer le Service Historique de la Défense au bénéfice des armées ! Une vraie révolution ! Magnifique challenge !

C'est dit !
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1 mai 2013 3 01 /05 /mai /2013 07:05

1er mai

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Excellente journée du 1er mai à tous.

Selon la tradition, tous nos souhaits de bonheur !

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28 mars 2013 4 28 /03 /mars /2013 06:50

Ecrire pour ne rien dire ?

  Commemoration868.jpg

Quelle mouche a donc piqué le rédacteur de ce bref billet, publié en rubrique "Culture" de l'hebdomadaire Valeurs Actuelles ? S'il suivait régulièrement notre site (rappelons l'adresse électronique qu'il peut enregistrer dans ses "favoris" : http://guerres-et-conflits.over-blog.com/ , merci. De rien !), avec ses 3 à 4 billets mis en ligne quotidiennement pour suivre l'actualité de la recherche et de l'édition en histoire, il se serait aperçu que depuis plusieurs mois ce sont les publications relatives au Ier Empire et à la Seconde guerre mondiale qui font l'actualité. Où est la "centaine d'ouvrages au moins" dont il parle ? Peu de livres en réalité sur la Grande Guerre (ce qui ne veut pas dire que "l'avalanche"ne va pas survenir à partir de l'été et de l'automne). Et la mention finale sur le "business que les éditeurs font avec la chair à canon des victimes" est pour le moins indélicate et déplacée... Qu'il s'agisse de la Grande Guerre, des précédentes, des suivantes, bref de tous les autres conflits, internationaux ou guerres civiles, voilà bien un point commun : il y a des victimes, hélas. C'est d'ailleurs en partie pour cela aussi que ces épisodes souvent tragiques sont étudiés et que l'on s'efforce de comprendre. Enfin, au sujet du "business", n'évoquons que pour mémoire certains périodiques ou éditeurs qui assurent leurs tirages  à partir des "petites phrases" et des échos des politicailleries présentes (et nous ne parlons pas des secrets d'alcove passés ou actuels de telle ou telle princesse ou maison régnante !). Il y aurait sans doute beaucoup à dire en la matière ... et à évaluer leur intérêt pour la connaissance.

Une fois de plus, il convient de tourner sept fois sa plume dans l'encrier avant d'écrire n'importe quoi.

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11 mars 2013 1 11 /03 /mars /2013 06:55

Les nuages noirs s'amoncellent ...

Inquiétudes ...

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Relevons parmi d'autres, dans l'actualité récente sur la toile, trois articles liés à la question de la (difficile) élaboration du prochain Livre blanc et des inquiétudes (très légitimes) que cela suscite. Quelques éléments de réflexion importants donc, à partir du réaliste "Surcouf" (La Voix de l'épée du 28 février), du pertinent "Vers une armée à trois vitesses" (Secrets défense du même jour) et de l'explicite "Ne réduisons pas le budget de la Défense" (Ultima Ratio du 1er mars).

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6 mars 2013 3 06 /03 /mars /2013 07:05

Il existe une "Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale"

Mais pour quelle(s) mission(s) ?

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Alors que les annonces et les projets surgissent de tous côtés, dans tous les départements et dans toutes les régions comme à l'étranger, les instances nationales restent totalement absentes. Ce n'est plus de la discrétion, c'est une disparition pure et simple. Après une très laborieuse mise en place des structures (GIP et conseil scientifique en particulier), on pouvait espérer que "le taureau serait pris par les cornes", à désormais un an et demi de l'échéance. Dans la grande tradition du "village gaulois" (la France n'est-elle pas un "pays de présidents" où chacun doit avoir une belle carte de visite ?), après une dizaine de mois perdus à se partager les places et les titres (ou à neutraliser celui que l'on veut empêcher d'y accéder), est-ce trop demander que d'espérer connaître (bientôt ?) les choix stratégiques et l'architecture générale de ce centenaire ? Mais toujours rien, depuis le rapport initial. De savantes individualités participent à ces réunions, mais le "collectif" semble totalement paralysé.

Par ailleurs, on peut de plus en plus légitimement s'interroger sur la très faible participation de vrais spécialistes des dimensions proprement militaires de la guerre elle-même dans ces organismes. Les compétences les plus diverses sont représentées (ce qui est bien sûr une bonne chose), mais au détriment de la composante "militaire" des travaux. Toutes les chapelles, écoles, niches et sous-thématiques des spéculations sur le "phénomène guerrier" sont là, mais à 5 ou 6 exceptions  près (dont 1 Britannique et 1 Américain) on ne trouve pas d'historiens de référence sur les armées et leurs opérations. Organisation, entrainement, équipements, commandement, évolutions, doctrines, planification, conduite, enseignements tactiques, opératifs, stratégiques, interaction entre les fronts, comparaisons entre les pays, les hommes et leur(s) rôle(s) personnel(s) à tous les niveaux des hiérarchies, les causes et les conséquences immédiates et plus lointaines, etc. : ne s'agirait-il donc là que d'éléments tout-à-fait secondaires et mineurs au sujet de la Grande Guerre ?

Il y a là une question de fond, que le vide sidéral qui entoure aujourd'hui la programmation générale des manifestations invite à poser.

WW 1 2

 

Ayant toujours une approche globale de l'histoire militaire sous toutes ses facettes, ce n'est pas nous qui nierons aujourd'hui l'importance des innombrables facteurs exogènes, culturels, sociaux, économiques, politiques, diplomatiques, techniques et scientifiques, financiers et budgétaires, etc., qui interagissent peu ou prou et de façon variable dans le temps sur le déroulement d'un conflit de cette ampleur. Le Service de santé, les mines de charbon, la presse ou une brève "trêve" un soir de Noël, parmi de multiples autres paramètres, tiennent bien sûr une place importante dans la Première Guerre mondiale. Mais il ne faut pas confondre le coeur du sujet et sa périphérie, l'essentiel et l'accessoire. Il ne faut pas "inverser les proportions". C'est bien du centenaire de la Grande Guerre qu'il s'agit, et non pas de placer bout-à-bout quelques manifestations commémoratives sur les évolutions générales de la France au XXe siècle. Ne confondons pas l'objet et ses conséquences, surtout lorsque celles-ci ont été (et sont) re-travaillées au filtre du temps, des idéologies et des engagements personnels.

Que veut-on faire ? Veut-on d'ailleurs même, simplement, "faire" quelque chose ?

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Une fois de plus, ces questions doivent être posées avec d'autant plus d'insistance que les semaines s'écoulent, dans le silence assourdissant des autorités. Quelle est la volonté affichée par l'Etat ? On nous en parlera sans doute pendant 15 ou 20 mn. lors du prochain 11 novembre... Pour nous annoncer quoi ? Une vague "commémoration Potemkine", avec façade ripolinée dans les tons pastels pour "faire bien" au JT de 20 heures et l'immensité du néant derrière la porte ?

Nous regrettons parfois, car cela témoigne d'une faiblesse de l'université française, que l'histoire (notre histoire) soit si souvent écrite par les historiens anglo-saxons. Rappelons simplement ce que disait sur notre sujet du jour le chef du gouvernement britannique, dès octobre 2012, lorsqu'il a personnellement présenté à l'Impérial War Museum les principes et les objectifs qu'il fixait aux commémorations du Centenaire :

- "A truly national commemoration",

- Célébration de l'entrée en guerre et de l'armistice certes, mais aussi des "major battles in between" (Somme, Jutland, Gallipoli, Passchendaele),

- Programme pour les écoles, "including trips to the battlefields",

- Un comité directeur formé d'anciens Secrétaires à la Défense, "chiefs of staff and military specialists",

- Une commémoration qui doit, comme le Jubilé de diamant de la reine, "says something about who we are as people".

Trois rapides extraits de ce discours pour en terminer, avant de rougir de honte. Pour le Premier ministre, "ce fut l'extraordinaire sacrifice d'une génération. un sacrifice qu'ils ont fait pour nous, et il est bon que nous nous en souvenions" ... La guerre a contribué "à faire ce que nous sommes aujourd'hui" ... "Il y a quelque chose dans la Première Guerre mondiale qui en fait un élément fondamental de notre conscience nationale".

Ne rêvons pas, c'était à Londres. Et nous n'aurons pas l'outrecuidance de comparer les budgets annoncés de part et d'autre de la Manche... 

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Là où ne souffle pas un grand vent frais, dans les structures étriquées où les manoeuvres de couloir et les procédures routinières serviront demain d'alibi à l'inaction, peut-il naître quelque grand projet fédérateur (et je ne parle pas de "mise en scène") ? Plus le temps passe, plus les interrogations deviennent intimes convictions. Au risque de ne pas avoir l'air "à la mode" (mais, au fait, pourquoi faudrait-il être "à la mode" en Histoire ?), je vais retrousser mes manches, continuer à essayer de convaincre, et travailler sur le plus grand nombre de projets possibles. Revenons aux fondamentaux et prouvons que le "culturel" n'est pas l'apanage de quelques uns : il a toute sa place dans la réflexion militaire stricto sensu en replaçant le phénomène "Guerre" en tant que tel au coeur des dossiers, et du Centenaire. J'espère que nous serons nombreux à nous retrouver sur ce chemin et à nous "entre-aider", chacun dans son domaine, dans sa ville, avec ses moyens, pour essayer d'éviter ce qui pourrait devenir, au "rythme" où (ne) vont (pas) les choses, un fiasco national, dans le pays qui a compté plus de 5,6 millions de soldats morts et de blessés. 

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3 mars 2013 7 03 /03 /mars /2013 07:00

(Une pause ce dimanche)  

Ancrages multiples et positions de pouvoir

XIXe - XXIe siècles  -  France et étranger

Journée d'études

LABYRINTHE-1.gif

Nous essayons de relayer autant que possible le maximum d'informations relatives à la recherche en histoire au sens large (150 brèves sur ces thèmes en un an). Mais nous ne parlons, hélas, que les langues bassement vernaculaires les plus courantes : français, éventuellement anglais, un peu d'allemand et quelques mots d'espagnol. Par contre, aucun de nous ne possède de dictionnaire "français / confus" et nous avons le plus grand mal à décrypter l'annonce de ces journées d'études, qui se tiendront en fin de semaine prochaine à l'université de Lyon 2. Nous en livrons un extrait à votre perspicacité :

"Elles [ces journées] se veulent l’occasion d’étudier l’ancrage pluriel d’un individu au prisme du pouvoir qu’il peut en retirer. Il s’agit d’analyser l’habiter polytopique, la multipositionnalité institutionnelle, l’ubiquité politique et l’appartenance sociale multiple dans le temps long, au travers des mutations socio-économiques, non pas indépendamment les uns des autres mais les uns en fonction des autres. Quelles sont les forces et faiblesses d’un parcours de vie pluriel ? Comment s’articulent mobilité et ancrage ? Dans quelle mesure la multilocalité se traduit-elle par l’émergence d’identités sociales multiples ? L’ancrage multiple est-il l’expression d’une stratégie à l’œuvre ? Fait-il l’objet d’une réappropriation stratégique visant à accroitre une influence, à assurer une liberté, à affermir une position de pouvoir ? Afin de répondre à ces questions, ..."

On savait que le monde académique avait parfois du mal à parler à la population "ordinaire", mais s'il n'est même plus compris de ses propres étudiants, c'est ennuyeux... En étant très attentif et très patient, ceux qui peuvent dépasser la première phrase comprennent le sens général, se disent que le sujet est effectivement intéressant et qu'il y a un vrai travail à effectuer, par exemple, sur les détenteurs de plusieurs fonctions d'autorité différentes et les notions de "réseaux personnels". Mais si les termes doivent en être aussi abscons et hermétiques : à quoi cela peut-il servir ? ... Ce n'est pas selon nous dans cette voie qu'il faut chercher à redorer l'aura de l'université.

LABYRINTHE-2.jpg

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5 février 2013 2 05 /02 /février /2013 07:00

A quoi servent les historiens ?

Parler, mais pour quoi dire au juste.

Lettre aux amis de la police et de la gendarmerie  -  n° 2 / 2013

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Nous relayons avec grand plaisir le savoureux billet d'humeur de Jean-Marc Berlière, en éditorial de la dernière Lettre aux amis de la police et de la gendarmerie. Constatant qu'une fois de plus une grande chaine d'information demande à un historien d'apporter un éclairage "scientifique" sur un sujet, mais que celui-ci n'est pas choisi en fonction de ses compétences et connaissances mais uniquement sur la base de sa notoriété médiatique, il pose la question de la reconnaissance des travaux novateurs publiés depuis quelques années. Novateurs, certes, mais globalement ignorés parce que les journalistes ne vont pas au fond des choses et parce que les "mandarins" défendent jalousement leur prérogatives : "Quand les historiens professionnels répètent les mêmes erreurs que celles que l'on profère depuis des décennies, ignorent les travaux qui se multiplient dans un domaine qui n'est certes pas le leur, nous touchons à mon sens un des aspects méconnu de la crise de l'Histoire". Vous pouvez remplacer simplement "police" ou "justice" par "Première Guerre mondiale" ou "guerre d'Indochine" et vous constaterez que les proximités sont troublantes... Les "modes médiatiques" n'ont que peu à voir avec la réalité de la recherche ... A lire ici.

Cette lettre d'information électronique apporte à tous ceux que les thématiques liées à l'histoire des services en charge de la sécurité intérieure et de l'ordre public intéressent une masse d'informations passionnantes dans tous les domaines.

Pour s'abonner, s'adresser à : berliere@cesdip.fr

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Qui Suis-Je ?

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  • : Guerres et conflits XIXe-XXIe s. se fixe pour objectif d’être à la fois (sans prétendre à une exhaustivité matériellement impossible) un carrefour, un miroir, un espace de discussions. Sans être jamais esclave de la « dictature des commémorations », nous nous efforcerons de traiter le plus largement possible de toutes les campagnes, de tous les théâtres, souvent dans une perspective comparatiste. C’est donc à une approche globale de l’histoire militaire que nous vous invitons.
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Cafés historiques de La Chouette

Prochaine séance : pour la rentrée de septembre. Le programme complet sera très prochainement mis en ligne.

Publications personnelles

Livres

 

doumenc-copie-1.jpgLa Direction des Services automobiles des armées et la motorisation des armées françaises (1914-1918), vues à travers l’action du commandant Doumenc

Lavauzelle, Panazol, 2004.

A partir de ma thèse de doctorat, la première étude d’ensemble sur la motorisation des armées pendant la Première Guerre mondiale, sous l’angle du service automobile du GQG, dans les domaines de l’organisation, de la gestion et de l’emploi, des ‘Taxis de la Marne’ aux offensives de l’automne 1918, en passant par la ‘Voie sacrée’ et la Somme.

 

La mobilisation industrielle, ‘premier front’ de la Grande Guerre ? mobil indus

14/18 Editions, Saint-Cloud, 2005 (préface du professeur Jean-Jacques Becker).

En 302 pages (+ 42 pages d’annexes et de bibliographie), toute l’évolution industrielle de l’intérieur pendant la Première Guerre mondiale. Afin de produire toujours davantage pour les armées en campagne, l’organisation complète de la nation, dans tous les secteurs économiques et industriels. Accompagné de nombreux tableaux de synthèse.

 

colonies-allemandes.jpgLa conquête des colonies allemandes. Naissance et mort d’un rêve impérial

14/18 Editions, Saint-Cloud, 2006 (préface du professeur Jacques Frémeaux).

Au début de la Grande Guerre, l’empire colonial allemand est de création récente. Sans continuité territoriale, les différents territoires ultramarins du Reich sont difficilement défendables. De sa constitution à la fin du XIXe siècle à sa dévolution après le traité de Versailles, toutes les étapes de sa conquête entre 1914 et 1918 (388 pages, + 11 pages d’annexes, 15 pages de bibliographie, index et cartes).

 

 caire damasDu Caire à Damas. Français et Anglais au Proche-Orient (1914-1919)

 14/18 Editions, Saint-Cloud, 2008 (préface du professeur Jean-Charles Jauffret).

Du premier au dernier jour de la Grande Guerre, bien que la priorité soit accordée au front de France, Paris entretient en Orient plusieurs missions qui participent, avec les nombreux contingents britanniques, aux opérations du Sinaï, d’Arabie, de Palestine et de Syrie. Mais, dans ce cadre géographique, les oppositions diplomatiques entre ‘alliés’ sont au moins aussi importantes que les campagnes militaires elles-mêmes.

 

hte silesieHaute-Silésie (1920-1922). Laboratoire des ‘leçons oubliées’ de l’armée française et perceptions nationales

‘Etudes académiques », Riveneuve Editions, Paris, 2009.

Première étude d’ensemble en français sur la question, à partir du volume de mon habilitation à diriger des recherches. Le récit détaillé de la première opération civilo-militaire moderne d’interposition entre des factions en lutte (Allemands et Polonais) conduite par une coalition internationale (France, Grande-Bretagne, Italie), à partir des archives françaises et étrangères et de la presse de l’époque (381 pages + 53 pages d’annexes, index et bibliographie).

 

cdt armee allde Le commandement suprême de l’armée allemande 1914-1916, édition annotée et commentée des souvenirs de guerre du général von Falkenhayn 

14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2010.

Le texte original de l’édition française de 1921 des mémoires de l’ancien chef d’état-major général allemand, accompagné d’un dispositif complet de notes infrapaginales permettant de situer les lieux, de rappeler la carrière des personnages cités et surtout de comparer ses affirmations avec les documents d’archives et les témoignages des autres acteurs (339 pages + 34 pages d’annexes, cartes et index).

 

chrono commChronologie commentée de la Première Guerre mondiale

Perrin, Paris, 2011.

La Grande Guerre au jour le jour entre juin 1914 et juin 1919, dans tous les domaines (militaire, mais aussi politique, diplomatique, économique, financier, social, culturel) et sur tous les fronts. Environ 15.000 événements sur 607 pages (+ 36 pages de bibliographie et d’index).

 

 Les secrets de la Grande Guerrecouverture secrets

Librairie Vuibert, Paris, 2012.

Un volume grand public permettant, à partir d’une vingtaine de situations personnelles ou d’exemples concrets, de remettre en lumière quelques épisodes peu connus de la Première Guerre mondiale, de la question du « pantalon rouge » en août 1914 à l’acceptation de l’armistice par von Lettow-Vorbeck en Afrique orientale, après la fin des hostilités sur le théâtre ouest-européen.

 

Couverture de l'ouvrage 'Mon commandement en Orient'Mon commandement en Orient, édition annotée et commentée des souvenirs de guerre du général Sarrail

14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2012

Le texte intégral de l'édition originale, passé au crible des archives publiques, des fonds privés et des témoignages des acteurs. Le récit fait par Sarrail de son temps de commandement à Salonique (1915-1917) apparaît véritablement comme un exemple presque caricatural de mémoires d'autojustification a posteriori

 

 

Coordination et direction d’ouvrages

 

Destins d’exception. Les parrains de promotion de l’Ecole Spéciale Militaire de Saint-Cyr

SHAT, Vincennes, 2002.

Présentation (très largement illustrée, 139 pages) des 58 parrains qui ont donné leur nom à des promotions de Saint-Cyr, entre la promotion « du Prince Impérial » (1857-1858) et la promotion « chef d’escadrons Raffalli » (1998-2001).

 

fflLa France Libre. L’épopée des Français Libres au combat, 1940-1945

SHAT, Vincennes et LBM, Paris, 2004.

Album illustré présentant en 191 pages l’histoire et les parcours (individuels et collectifs) des volontaires de la France Libre pendant la Seconde guerre mondiale.

 

marque courageLa marque du courage

SHD, Vincennes et LBM, Paris, 2005.

Album illustré présentant en 189 pages l’histoire des Croix de Guerre et de la Valeur Militaire, à travers une succession de portraits, de la Première Guerre mondiale à la Bosnie en 1995. L’album comporte en annexe une étude sur la symbolique, les fourragères et la liste des unités d’active décorées.

 

  90e anniversaire de la Croix de guerre90-ANS-CROIX-DE-GUERRE.jpg

SHD, Vincennes, 2006.

Actes de la journée d’études tenue au Musée de l’Armée le 16 novembre 2005. Douze contributions d’officiers historiens et d’universitaires, français et étrangers, de la naissance de la Croix de guerre à sa perception dans la société française, en passant les décorations alliées similaires et ses évolutions ultérieures.

 

france grèceLes relations militaires franco-grecques. De la Restauration à la Seconde guerre mondiale 

SHD,Vincennes, 2007.

Durant cette période, les relations militaires franco-grecques ont été particulièrement intenses, portées à la fois par les sentiments philhellènes qui se développent dans l’hexagone (la France est l’une des ‘Puissances protectrices’ dès la renaissance du pays) et par la volonté de ne pas céder d’influence aux Anglais, aux Allemands ou aux Italiens. La campagne de Morée en 1828, l’intervention en Crète en 1897, les opérations en Russie du Sud  en 1919 constituent quelques uns des onze chapitres de ce volume, complété par un inventaire exhaustif des fonds conservés à Vincennes.

 

verdunLes 300 jours de Verdun

Editions Italiques, Triel-sur-Seine, 2006 (Jean-Pierre Turbergue, Dir.).

Exceptionnel album de 550 pages, très richement illustré, réalisé en partenariat entre les éditions Italiques et le Service historique de la Défense. Toutes les opérations sur le front de Verdun en 1916 au jour le jour.

 

DICO-14-18.jpgDictionnaire de la Grande Guerre

(avec François Cochet), 'Bouquins', R. Laffont, 2008.

Une cinquantaine de contributeurs parmi les meilleurs spécialistes de la Grande Guerre, 1.100 pages, 2.500 entrées : toute la Première Guerre mondiale de A à Z, les hommes, les lieux, les matériels, les opérations, les règlements, les doctrines, etc.

 

fochFerdinand Foch (1851-1929). Apprenez à penser

(avec François Cochet), 14/18 Editions - SOTECA, Saint-Cloud, 2010.

Actes du colloque international tenu à l’Ecole militaire les 6 et 7 novembre 2008. Vingt-quatre communications balayant tous les aspects de la carrière du maréchal Foch, de sa formation à son héritage dans les armées alliées par des historiens, civils et militaires, de neuf nations (461 pages + 16 pages de bibliographie).

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