De l'empire assyrien à la guerre d'Algérie

Guerres & Histoire  -  n° 81

Toujours aussi varié, toujours aussi passionnant, ce numéro d'hiver nous entraîne à la découverte de l'empire assyrien, quelques 2.000 ans avant J.-C., avec en particulier un long article sur son armée ("une organisation rigoureuse et rationnelle avec une efficacité tactique hors pair"). Parmi les autres articles, nous retenons en particulier celui sur la naissance de l'armée française moderne sous Charles VII, celui sur la guerre d'indépendance de l'Irlande après a Première Guerre mondiale, celui sur les combats et les malheurs de l'armée de l'Est du général Bourbaki en 1870-1871 et celui sur le colonel Trinquier, "le soldat oublié". Une vraie réussite éditoriale.

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Des hommes et des matériels

Les Ailes  -  n° 15

Dans le dernier numéro du magazine Les Ailes, relevons entre autres l'article sur la 15e escadre au combat et celui sur les 70 ans de l'ALAT :

https://www.avions-bateaux.com/produit/recherche/5753

Malplaquet, 1709

Clément Oury

Plutôt mal connue dans ses détails et souvent mal interprétée dans ses conséquences, la bataille de Malplaquet permet de sauver la France de l'invasion après une succession de défaites, et à ce seul titre au moins méritait largement que ce beau volume lui soit consacré.

En trois grandes parties ("Face à l'invasion", "La violence se déchaîne", et "La bataille après la bataille"), Clément Oury, déjà auteur en 2020 d'une passionnante histoire de la guerre de Succession d'Espagne (http://guerres-et-conflits.over-blog.com/2020/04/une-reference.html), nous fait revivre ces journées terribles de l'été et de l'automne 1709. Dans un premier temps, il rappelle le contexte (hiver exceptionnellement rigoureux pendant deux mois), misère de la population, coalition européenne, une armée française "affamée, démoralisée et dépassée en nombre", et l'entrée en guerre à l'été suivie par l'obligation pour le maréchal de Villars de se replier vers le "pré carré français". Il présente ensuite le détail de la bataille en commençant à partir de la situation le 9 septembre. Pour les coalisés, l'armée du maréchal de Villars est "le dernier obstacle sur la route de Paris", mais les Français, bien qu'étant en sous-effectif, sont fermement décidés "à tenir le plus longtemps possible". Villars sait choisir son terrain (très boisé) et l'aménager, dispose judicieusement ses troupes. Clément Oury observe que le 11 septembre "Malplaquet est sans doute l'un des affrontements où l'artillerie joue le plus grand rôle". Les Français se défendent avec acharnement, se repliant légèrement sur leur gauche mais, à la mi-journée, maintenant leurs positions ailleurs. Au fil des pages d'ailleurs, l'auteur analyse la manoeuvre d'un bataillon et les différentes phases tactiques et passe avec brio du niveau des généraux à celui des hommes de troupe. ¨Peu à peu il faut se redéployer, et l'infanterie laisse le premier rôle à la cavalerie ("avec peut-être 25.000 cavaliers, il s'agit de l'un des plus formidables combats de cavalerie de l'histoire moderne"). Villars doit finalement ordonner la retraite, et celle-ci peut être conduite en bon ordre, en dépit des combats d'arrière-garde et de circonstances défavorable. La victoire serait donc aux Coalisés, puisque ceux-ci restent maîtres du terrain ? Toutefois, leurs pertes extrêmement importantes (supérieures à celles subies par les Français) et leurs généraux ne lancent pas immédiatement la poursuite, perdant ainsi le bénéfice de leur victoire d'un jour, et la situation s'enlise dans le cadre du siège de Mons, les deux armées étant totalement épuisée : "Les chevaux périssent faute d'avvoine et de foin. Les soldats, mal nourris, murmurent et parfois grondent ... Les officiers n'arrivent plus à faire respecter la discipline". Finalement, la résistance de pied ferme a payé. Le livre se termine sur les conséquences immédiates et à plus long terme de la bataille et sur le souvenir qui en a été conservé, modifié, entretenu, chez les différents belligérants.

Finalement, le refus de la défaite et les hésitations de l'ennemi peuvent transformer une défaite tactique en victoire stratégique. Le royaume de France échappe à l'invasion et Louis XIV peut envisager de traiter honorablement avec ses ennemis. Un livre tout à fait intéressant, qui apporte beaucoup sur les modes d'action des armées du grand Siècle et complète utilement nos connaissances sur les guerres du règne du Roi Soleil.

Perrin, Paris, 2024, 358 pages, 25,- euros.

ISBN : 978-2-262-09571-0.

Pour commander directement le livre : https://www.lisez.com/livre-grand-format/malplaquet-1709/9782262095710

Castelnau

Le maréchal escamoté

Parution chez Tallandier d'une biographie du général de Castelnau, de sentiment monarchiste et profondément catholique, mais avant tout soucieux de l'intérêt national

https://www.tallandier.com/livre/castelnau/ :

Poutine

Lord of War

Colonel Peer de Jong

Saviez-vous que Vladimir Poutine, lorsqu'il était jeune officier des services russes en DDR, portait le nom de M. Platov ? Spécialiste des questions de sécurité et de défense (http://guerres-et-conflits.over-blog.com/2023/03/mercenariat.html et http://guerres-et-conflits.over-blog.com/2019/03/afrique-et-onu.html, par exemple), Peer de Jong nous propose avec cet ouvrage un portrait à la fois fouillé et renouvelé de la personnalité profonde du chef de l'Etat russe, sur les Sociétés militaires privées et sur la guerre d'Ukraine : "Le monde redevient ce qu'il a toujours été... Un monde dangereux. Poutine l'Africain, en se jetant sur l'Ukraine, a troublé le fragile équilibre mis en place dans les années 11950. Personne ne l'avait vu venir. Poutine, Lord of War, porte la guerre comme projet de société".

Le livre s'ouvre sur les souvenirs de l'auteur comme aide de camp des présidents de la République et ayant à ce titre pu approcher Poutine, ce qui donne une première approche de la personnalité de l'intéressé à travers des situations vécues, souvent en très petit comité, puis il divise son propos en quatre parties principales : "La chute de la maison Prigojine", "Le temps des boyards", "Poutine l'Africain", et "Les tambours de guerre". La première partie revient sur l'engagement de la SMP Wagner sur le front russo-ukrainien, sur les dissensions croissantes avec Poutine, sur "l'accident" (?...) d'avion qui entraîne la mort de l'ancien favori du maître du Kremlin, devenu inutile et dangereux. La seconde s'interroge sur la nature de Wagner ("C'est le bouleau qui cache la taïga. Agissant entre l'armée et la diplomatie, les milices et les groupes d'autodéfense font partie de l'histoire de la Russie. Presque une tradition qui ne demandait qu'à être réactivée"). Pour Poutine, ces différents groupes permettent d'agir de façon non officielle, politiquement mais temporairement utile : "Agir aux limites de la légalité ou aux bordures normales de l'usage de la force, c'est justement le créneau d'emploi privilégié des sociétés militaires privées russes". La troisième s'intéresse prioritairement à la situation au Sahel, où l'auteur a pu constater la montée en puissance des "coopérants" russes, parallèlement à la baisse d'influence de la France : "Les critiques fusent principalement contre la France qui semble avoir perdu sa boussole africaine et donc sa légitimité". Cette politique indirecte de Moscou entraîne un contournement de l'OTAN et des Etats ouest européens par le sud, d'abord à partir de la Libye, puis de la Centrafrique, enfin du Sahel. La quatrième est consacrée à la guerre russo-ukrainienne, "une guerre sans déclaration ... Les répliques de ce tremblement de terre stratégique sont pour l'instant inconnues mais elles ne peuvent que se multiplier". L'auteur y aborde les questions des rapports de Poutine avec les pays étrangers, amis ou "ennemis", les discours autour du nucléaire, l'instrumentalisation des médias et la cyber-guerre, mais aussi la résistance ukrainienne et l'inventivité des Ukrainiens face à la puissance russe.

Le livre se termine où il avait commencé, en DDR, dans l'immeuble du KGB à Dresde, où "Vladimir Poutine à la fenêtre du premier étage et sept autres agents du KGB observent, les armes à la main, la foule vociférante et vengeresse qui s'en prend aux bâtiments limitrophes de la STASI ... C'est la chute du mur à Berlin en même temps que celle des illusions soviétique sur l'Europe".  Un livre très intéressant par les analyses qu'il propose et par les pistes de réflexion qu'il ouvre. Vivement conseillé.

Mareuil éditions, Paris, 2024, 255 pages, 21,- euros.

ISBN : 978-2-372-54374-3.

Pour commander directement le livre : https://www.mareuil-editions.com/product-page/poutine-lord-of-war