Nous reprenons nos présentations de maisons d'édition peu connues, "petites" par la surface financière, mais "grandes" mapr la passion de leurs animateurs. N'hésitez jamais, en particulier à l'occasion de vos déplacements en province, à regarder dans les librairies quelles sont les publications locales ou régionales. Il y a là de véritables trésors.
Henri Taverner
(Toulouse)
Question : Pouvez-vous nous présenter en quelques phrases l'origine et la création de votre maison d'édition ?
Réponse : Après avoir été correcteur dans la presse magazine, je décidais de me lancer dans l’édition en prenant la casquette d’auteur pour un premier livre destiné à ouvrir la porte à d’autres manuscrits. Ce livre, L’Ariège cycliste, portait en germe nos deux orientations éditoriales : l’histoire du sport et les Pyrénées. Deux orientations nées de mon goût et de ma pratique de ces deux univers. J’ai reçu pour ce livre le prix du Document sportif, ce qui nous a fait rapidement connaître dans le petit monde du vélo en particulier.
Question : Votre catalogue semble témoigner d'une triple passion pour les Pyrénées, le sport et l'histoire. Sont-ils fondateurs de votre politique éditoriale et comment conjuguez-vous trois thèmes apparemment aussi différents ?
Réponse : Vous parlez d’une triple passion, effectivement il se trouve qu’on a assez vite reçu des propositions de manuscrits qui associaient au moins deux de nos centres d’intérêt. Ce fut toujours le fruit de rencontres. Je pense en particulier à ce fils de passeur qui me proposa sur un salon minuscule au fin fond d’une vallée de publier les témoignages qu’il avait rassemblés sur cet épisode de la guerre 39-45 très marquant dans les Pyrénées (Les Cols de l’espoir). De mon côté je cherchais aussi des textes pionniers dans l’histoire du vélo.
Les regards distanciés sur le fait sportif sont plus rares que ceux motivés par la nostalgie ou l’admiration, ils sont donc d’autant plus précieux. Raconter le Tour 1914 qui démarre le jour de l’assassinat de Sarajevo est un de ces tours de force réussis (Le Tour de France 1914, de la fleur au fusil à la baïonnette au canon). Se pencher sur les rapports entretenus par Le sport et la presse sous l’Occupation, comme l’a fait Jacques Seray, en est un autre. Dans ces deux livres, le sport offre une grille de lecture inattendue de l’Histoire. Tout à fait ce qu’on cherche à publier.
Question : Comment sélectionnez-vous les manuscrits que vous publiez et accordez-vous une place particulière aux jeunes auteurs ? Avez-vous une politique volontariste en ce domaine ?
Réponse : Il faut d’abord que le manuscrit proposé entre dans un de nos domaines. Comme petit éditeur, il est important d’être clairement identifié et ne pas publier dans tous les sens. L’âge des auteurs n’est pas un critère, c’est le sujet qui prime. Ainsi l’antiquaire de l’escrime, ancien maître d’armes qui me propose de raconter comment est né l’escrime – son évolution, ses codifications –, est un jeune auteur puisque c’est son premier livre (La Légende de l’escrime). Une jeune institutrice nous envoie le récit de son tour du monde à bicyclette (À l’école du monde) et reçoit le prix du Meilleur récit de voyage : voilà une belle histoire pour elle et pour nous.
A contrario, la fidélité est partagée avec Alain Bourneton, auteur pyrénéiste dont nous avons publié quatre livres, qui ont contribué à nous faire connaître sur les Pyrénées et bien au-delà grâce à sa notoriété. Notamment avec des livres de référence (et salués par des prix) sur Gavarnie et sur L’Isard, animal emblématique du massif, dont nous avons ensuite publié les récits de chasse (Souvenirs d’un chasseur de haute montagne).
Question : Rencontrez-vous des difficultés particulières sur le plan de la diffusion ? Comment assurez-vous la promotion de vos ouvrages ?
Réponse : La diffusion : le mot qui fait mal aux oreilles des petits éditeurs. C’est le gros problème. On a beau avoir un diffuseur national (Pollen), c’est loin d’être gagné face à l’artillerie lourde des grands groupes. Alors on essaie de trouver des solutions, de mériter la fidélité de médias attentifs à nos nouveautés, de collaborer étroitement avec les auteurs qui sont parfois les meilleurs diffuseurs de leur travail. De mon côté, je diffuse et distribue moi-même sur l’Ariège, département méconnu et à l’histoire riche, pour lequel j’ai un fort attachement.
Notre site-catalogue sur Internet (lepasdoiseau.fr) nous sert aussi de vitrine, ce qui est incontournable aujourd’hui.
Question : Quels sont vos axes de développement à court et à moyen terme ? Comment envisagez-vous l'avenir ?
Réponse : Je ne vous apprends rien en disant que la période est difficile. Alors on attend des jours meilleurs en travaillant un peu plus pour d’autres éditeurs pour lesquels on fait de la correction et de la mise en page. Notre but n’est pas de grandir, mais plutôt de publier des textes qu’on trouve passionnants parce qu’ils posent un regard novateur sur un domaine ignoré ou peu traité, tout en restant dans notre ligne éditoriale. Je pense en particulier au 14-18, le sport sort des tranchées et au récit du Tour de France 1914. Recevoir de tels manuscrits est un immense plaisir, il y en aura d’autres.
Je me croyais dans un moment creux et je viens de recevoir deux manuscrits passionnants dont l’un est le journal d’une lycéenne toulousaine sous l’Occupation. L’avenir immédiat, c’est aussi le salon “Vivons livres” de mi-novembre à Toulouse où nous serons en première ligne puisque le thème en sera Sports et Littératures. Toute occasion de se faire connaître est bonne, aussi je vous remercie de m’avoir donné la parole sur votre blog.
Merci pour ces réponses au travers desquelles transparait une vraie passion. Bon courage et plein succès dans vos prochaines initiatives.