Paroles de soldats

Vivre la Grande Armée

Être soldat au temps de Napoléon

François Houdecek

De très nombreux officiers, sous-officiers et même soldats des armées impériales ont publié leurs souvenirs de campagne après 1815, et grâce à cette imposante documentation, François Houdecek peut nous raconter ces quinze années de campagnes à travers l'Europe.

En effet, si les batailles ont souvent été décrites, y compris parfois "à hauteur d'homme", l'intérêt de ce volumineux ouvrage, parfaitement référencé, est de nous faire revivre en quatre grandes parties d'ampleur inégale l'ensemble de la vie d'un grognard : "Du citoyen au soldat", "Gloire et souffrance, ou la vie quotidienne en campagne, "La bataille, ou la gigantesque loterie humaine", et "Quand la guerre se retire : résilience et traumatismes". Les première et troisième parties sont, en nombre de pages, les plus importantes. La première nous entraîne du tirage au sort et du conseil de recrutement à l'arrivée au régiment, au premier équipement, à la vie dans la chambrée et bien sûr à l'instruction menée à la rude. La seconde commence bien sûr par les marches (c'est avec les jambes de ses soldats que Napoléon a conquis l'Europe) et les plaisirs simples, pouvoir fumer, jouer aux cartes, passer du bon temps avec ses camarades et évidemment les questions de relations amoureuses. La troisième partie commence par la veillée d'armes le jour précédent le combat, puis l'entrée en lice de l'artillerie (déjà !), l'action et les manoeuvres de l'infanterie, les charges de cavalerie, et pose la question de comment tenir au milieu de ce déluge de violence et de feu. La mort est omniprésente car les batailles impériales sont très meurtrières, sans oublier le sort des blessés même si les premières "ambulances volantes" du docteur Larrey commence à être mises en service, et enfin l'angoisse d'être fait prisonnier. La dernière partie enfin évoque assez rapidement le retour à la vie civile en fin de service, avec toutes les difficultés liées notamment aux fatigues accumulées et aux blessures visibles ou invisibles.

En conclusion, l'auteur tente d'établir un bilan aussi précis que possible des pertes humaines du fait de ces quinze années de campagnes presque ininterrompues : de l'ordre d'un million d'hommes dont près de la moitié pour les années 1812-1814. Une belle étude, avec de très nombreuses citations des acteurs de l'époque. Un volume qui a indiscutablement toute sa place dans une bibliothèque d'histoire militaire bien tenue.

Une étude parfaitement complémentaire des indispensables ouvrages de Jean-François Brun sur le sujet.

CNRS Editions, Paris, 2023, 407 pages, 26,- euros.

ISBN : 978-2-271-12411-1.

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